Contrefaçon de modèles : devant quelle juridiction l’avocat doit-il engager l’action pour obtenir l’indemnisation du préjudice ?

Contrefaçon de modèles : devant quelle juridiction l’avocat doit-il engager l’action pour obtenir l’indemnisation du préjudice ?  Quand l’exploitation des objets contrefaisants a lieu sur différents pays, quelle juridiction saisir ?  Classiquement, pour obtenir l’indemnisation de son préjudice l’action du titulaire des droits protégés nationalement est menée pays par pays ou devant la juridiction du siège du présumé contrefacteur. Est-il possible de combiner ces deux actions ?

 

L’arrêt de la Cour de Paris du 16 janvier 2013 semble l’admettre encore qu’il ne soit pas certain à la seule  lecture de cette décision que l’action menée devant la juridiction du domicile du contrefacteur allégué ait porté sur une demande indemnitaire.

 

SA REUVEN’S II, exerçant sous l’enseigne SINEQUANONE, a pour activité la création et la commercialisation d’articles de prêt-à-porter féminin qu’elle distribue soit auprès de détaillants soit dans ses propres boutiques en France et dans le monde ;

SA REUVEN’S commande auprès de la société de droit danois SAINT TROPEZ A/S différents vêtements qu’elle qualifie de contrefaçon de ses créations.

Deux constats  d’huissier, des 6 octobre et 8 novembre 2006, attestent de ces livraisons en France.

18 décembre 2006 : SA REUVEN’S II assigne SAINT TROPEZ A/S devant le Tribunal de commerce de Paris.

23 février 2010, le Tribunal de commerce de Paris condamne SAINT TROPEZ A/S pour contrefaçon et concurrence déloyale

La lecture de l’arrêt du 16 janvier 2013 nous apprend que la SA REUVEN’S II a saisi une juridiction danoise « afin d’obtenir la communication de l’ensemble des documents comptables permettant d’appréhender sur tout le territoire européen, la masse contrefaisante litigieuse ».

SA REUVEN’S II demande à la Cour de Paris de sursoir à statuer dans l’attente des informations demandées devant le juridiction danoise.

I : SUR LA DEMANDE DE SURSIS À STATUER :

Considérant qu’à titre liminaire la SA REUVEN’S II demande à la cour de surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la cour commerciale et maritime d’Elsinore (Danemark) relative à l’obtention des preuves comptables de la société SAINT TROPEZ A/S, sur l’ensemble du territoire communautaire et nécessaire à la détermination du quantum indemnitaire provisionnel alloué en première instance ;

Considérant que la société SAINT TROPEZ A/S s’oppose à cette demande en faisant valoir qu’elle verse aux débats un rapport d’audit du cabinet Deloitte indiquant le chiffre d’affaires qu’elle a réalisé en France pour les seuls modèles de vêtements C2277, C6018 et C6254 dont la SA REUVEN’S II a démontré la vente en France, ce qui doit permettre à la cour d’établir le préjudice de la SA REUVEN’S II en France sans avoir à surseoir à statuer ;

Considérant qu’il ressort des éléments de la cause que la SA REUVEN’S II a saisi la cour commerciale et maritime d’Elsinore (Danemark) afin d’obtenir la communication de l’ensemble des documents comptables permettant d’appréhender sur tout le territoire européen, la masse contrefaisante litigieuse ; que la procédure orale devant cette juridiction aux fins de désignation d’un expert est en cours ;

Considérant qu’il sera rappelé que la compétence des juridictions françaises pour connaître du présent litige a été admise par arrêt de la cour de céans en date du 20 février 2008, dont le pourvoi a été rejeté par arrêt de la cour de cassation en date du 25 mars 2009, le fait dommageable s’étant produit en France dans la mesure où la société SAINT TROPEZ A/S a accepté de livrer en France les produits argués de contrefaçon ;

Considérant qu’au regard des dispositions de l’article 5.3 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, cette compétence est toutefois limitée aux seuls faits dommageables commis sur le territoire national ;

Considérant que dans la mesure où l’action engagée au Danemark vise à évaluer la masse contrefaisante sur l’ensemble du territoire européen et non pas seulement en France, le résultat de cette procédure ne peut avoir de conséquence sur l’affaire en cours et que, dès lors, il convient de débouter la SA REUVEN’S II de sa demande de sursis à statuer ;

La Cour a donc examiner dans son arrêt du 16 janvier 2013 l’appel de SAINT TROPEZ A/S sur les demandes en contrefaçon et en concurrence déloyale y compris les demandes indemnitaires que la SA REUVEN’S II a présentées, mais uniquement pour la commercialisation des articles litigieux en France.

Appréciation du risque de confusion quand la marque première est composée d’une juxtaposition de lettres, qui se retrouve en partie dans la marque seconde mais avec un ensemble de mots ayant un sens en français

L’analyse des antériorités pour apprécier le risque présenté par une nouvelle marque, demeure un exercice délicat, cet exercice devient encore plus périlleux quand le signe est composé de simples lettres. Illustration avec l’arrêt du 11 janvier 2013 du TPUE, T‑568/11,Kokomarina contre OHMI

30 octobre 2008 : dépôt par Kokomarina pour désigner « Vêtements, chaussures, chapellerie » du signe :

31 juillet 2009 : opposition par Euro Shoe Unie, devenue Vana Real Estate  sur la marque Benelux verbale antérieure DMG pour désigner notamment classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

22 juillet 2010 : la division d’opposition accueille l’opposition.

21 septembre 2010 : recours de Kokomarina

21 juillet 2011 : la première chambre de recours de l’OHMI rejette le recours.

Au jugement rapporté, cette décision est ainsi citée « Cette dernière a, d’abord, considéré, au point 19 de la décision attaquée, que le territoire pertinent était celui du Benelux et que le consommateur visé était le consommateur moyen des produits concernés, à savoir les articles vestimentaires et les chaussures, censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. La chambre de recours a, ensuite, au point 21 de la décision attaquée, entériné la décision de la division d’opposition, en ce que cette dernière avait considéré que les produits concernés par la demande de marque et par la marque antérieure compris dans la classe 25 étaient identiques. La chambre de recours a, enfin, conclu, au point 31 de la décision attaquée, eu égard à l’identité des produits concernés, aux similitudes visuelle et phonétique des signes en conflit, au « principe de l’image imparfaite gardée en mémoire » et au fait que l’élément composant la marque antérieure était totalement inclus dans le composant visuellement dominant, ou du moins le plus proéminent de la marque demandée, à l’existence d’un risque de confusion. »

Recours de Kokomarina, que le Tribunal va rejeter.

Nous ne nous intéressons ici qu’à l’appréciation du risque de confusion entre les deux signes

40      Premièrement, sur le plan visuel, il est exact, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée, que la marque demandée est écrite sur trois lignes, contrairement à la marque antérieure qui est écrite sur une ligne seulement.

41      Toutefois, ainsi que l’a également relevé à juste titre la chambre de recours aux points 26 et 27 de la décision attaquée, l’élément le plus proéminent de la marque demandée est l’élément verbal IDMG figurant en caractères majuscules qui se détache, du fait même de la taille extrêmement large des caractères d’imprimerie et de la couleur noire sur fond blanc, des autres éléments constituant ladite marque, et ce d’autant plus pour les consommateurs germanophones ou néerlandophones. En effet, en particulier pour ces derniers, l’expression « interdit de me gronder » sera plus difficilement mémorisable dans le cas où elle ne serait pas comprise. Par ailleurs, il est fort probable que l’élément verbal « interdit de me gronder », bien que figurant en première position, ne soit pas à même d’attirer davantage l’attention du consommateur visé en raison de l’écriture enfantine utilisée ainsi que de la couleur gris clair des caractères qui se détachent plus difficilement sur le fond blanc que l’élément « idmg ». Or, les trois dernières lettres de la marque demandée, à savoir les lettres « d », « m » et « g », sont identiques à la marque antérieure et sont placées dans le même ordre.

42      Il s’ensuit que, nonobstant la présence de l’élément verbal « interdit de me gronder » et de la lettre supplémentaire « i » dans la marque demandée, les signes en conflit présentent entre eux une certaine similitude visuelle.

43      Deuxièmement, sur le plan phonétique, il existe, ainsi que l’a relevé, à juste titre, la chambre de recours au point 28 de la décision attaquée, une similitude entre les signes en conflit étant donné que la marque antérieure est totalement incluse dans la marque demandée et cette similitude sera particulièrement prononcée en ce qui concerne les consommateurs, tels les consommateurs germanophones ou néerlandophones, qui ne prononceraient pas l’expression « interdit de me gronder », laquelle risque d’être plus difficilement mémorisable pour ce public.

44      Par ailleurs, même les consommateurs francophones pourraient avoir tendance à ne pas prononcer l’expression « interdit de me gronder » par simple économie de langage, cette dernière étant longue à prononcer et aisément séparable de l’élément le plus visible et qui se détache nettement de la marque demandée, à savoir l’élément « idmg » ……..

45      Dans une telle perspective, à l’exception de la lettre « i », les trois autres lettres des signes en conflit se prononcent de manière identique et présentent donc, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 29 de la décision attaquée, une similitude phonétique qui est au moins moyenne.

46      Troisièmement, sur le plan conceptuel, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 30 de la décision attaquée, que les éléments « dmg » et « idmg » étaient dépourvus de toute signification dans les langues visés. Certes, si l’expression « interdit de me gronder » sera comprise par le public francophone, en revanche, le public germanophone ou néerlandophone ne sera pas à même de la comprendre. Ladite expression étant à l’égard de ce dernier dépourvue de toute signification, l’aspect conceptuel ne saurait influencer la perception des signes en conflit.

47      Il résulte de ce qui précède qu’il existe une certaine similitude visuelle et phonétique entre les signes en conflit, en sorte que ces derniers sont globalement similaires.

 

EcoDoor une marque non valable pour des appareils ménagers ayant une porte et pour lesquels les consommateurs sont attentifs à l’origine ou au comportement écologique de l’appareil

L’écologie est une valeur à laquelle les consommateurs sont sensibles, le Tribunal par son arrêt du 15 janvier 2013 souligne la fragilité de la marque qui se compose de la troncation eco.

 

8 juillet 2010 / BSH Bosch und Siemens Hausgeräte GmbH dépose la marque : ecoDoor.

Pour «  des machines et des appareils relevant des classes 7, 9 et 11 »

22 décembre 2010 : rejet de la demande d’enregistrement pour:

–        classe 7 : « Machines et appareils électriques pour le ménage et la cuisine (compris dans la classe 7), machines et appareils pour préparer des boissons et/ou des aliments, pompes pour servir des boissons refroidies pour l’utilisation en combinaison avec des appareils pour refroidir des boissons ; machines à laver la vaisselle ; machines et appareils électriques pour traiter le linge et les vêtements (compris dans la classe 7), y compris lave-linge, essoreuses » ;

–        classe 9 : « Distributeurs automatiques de boissons ou d’aliments, distributeurs automatiques à prépaiement » ;

–        classe 11 : « Appareils de chauffage, de production de vapeur et de cuisson, notamment fourneaux, appareils pour cuire, rôtir, griller, toaster, décongeler et maintenir au chaud, chauffe-eau, appareils de réfrigération, en particulier réfrigérateurs, congélateurs, vitrines réfrigérantes, appareils pour le refroidissement de boissons, combinés réfrigérateur/congélateur, appareils de congélation, sorbetières et appareils pour faire de la glace ; séchoirs, notamment aussi sèche-linge, machines à sécher le linge»

Recours du déposant.

22 septembre 2011 : la première chambre de recours de l’OHMI rejette le recours.

15 janvier 2013 : le Tribunal rejette le recours, affaire T‑625/11,

 

  • L’emploi de la troncation eco

20      En premier lieu, s’agissant de la perception de l’élément « eco », la requérante soutient que le public pertinent ne l’assimilera pas immédiatement aux expressions « respectueux de l’environnement » ou « économique sur le plan énergétique ».

21      Or, ainsi que l’a relevé la chambre de recours, le préfixe « eco » constitue une abréviation couramment utilisée du terme anglais « ecological » signifiant « écologique ». La référence « eco » est souvent utilisée dans le cadre de la commercialisation de biens et de services pour indiquer l’origine écologique du produit ou l’absence d’impact sur l’environnement de son utilisation …

22      Dans ces circonstances, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’élément « eco » allait être perçu par le public pertinent comme signifiant « écologique ».

  • ecodoor a donc un sens pour le public pertinent

24      Or, dans la mesure où, d’une part, l’élément « eco » sera perçu comme signifiant « écologique », ainsi qu’il ressort des points 20 à 22 ci‑dessus, et, d’autre part, l’élément « door » sera interprété comme se référant à une « porte », c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le terme « ecodoor » serait immédiatement compris par le public pertinent comme signifiant « porte éco » ou « porte dont la construction et le mode de fonctionnement sont écologiques ».

  • L’absence du caractère distinctif

25      En troisième lieu, s’agissant du caractère descriptif de la marque demandée, la requérante soutient que, à la suite de la limitation de la liste des produits opérée par elle dans la requête, ladite marque ne vise plus de pièces des machines et des appareils, telles que des portes, mais uniquement les machines et appareils en tant que tels. Dans ces circonstances, la marque demandée ne serait pas descriptive des produits visés par elle, dont les produits énumérés au point 4 ci‑dessus, mais, tout au plus, de l’une de leurs pièces.

26      À cet égard, un signe qui est descriptif d’une caractéristique d’une pièce incorporée dans un produit peut être également descriptif de ce même produit. Tel est le cas lorsque, dans la perception du public pertinent, la caractéristique de ladite pièce décrite par le signe est susceptible d’avoir un impact significatif sur les caractéristiques essentielles du produit lui‑même. En effet, dans ce cas de figure, le public pertinent assimilera immédiatement et sans autre réflexion la caractéristique de la pièce décrite par le signe aux caractéristiques essentielles du produit concerné.

27      En l’espèce, il ressort des points 20 à 24 ci‑dessus que la marque demandée sera interprétée par le public pertinent comme signifiant « porte éco » ou « porte dont la construction et le mode de fonctionnement sont écologiques ».

28      Ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 17 de la décision attaquée, sans que ce constat soit contesté par la requérante, les produits énumérés …. peuvent comporter des portes. Dans ces circonstances, la marque demandée est susceptible de décrire les qualités écologiques de la porte dont est équipé le produit en cause.

  • Peu importe la caractéristique concrète associée par le public concerné

32      La requérante soutient encore que la marque demandée ne permet pas d’identifier quelle caractéristique ou finalité concrète en rapport avec l’environnement est visée. En effet, plusieurs possibilités existeraient à cet égard, telles qu’une production respectueuse de l’environnement, l’utilisation de matériaux naturels, la possibilité d’élimination des déchets respectueuse de l’environnement ou un fonctionnement respectueux de l’environnement.

33      À cet égard, il suffit de constater que toutes les possibilités évoquées par la requérante renvoient au fait que le produit visé par la marque demandée est doté d’un caractère écologique en raison des qualités de la porte dont il est équipé. Dans ces circonstances, quelle que soit l’interprétation exacte de la marque demandée retenue par le public pertinent, cette dernière sera perçue comme décrivant directement une qualité essentielle des produits concernés.

Quand l’OHMI enregistre une marque qui porte atteinte au drapeau de la commission européenne « Sur fond azur, un cercle composé de douze étoiles d’or à cinq rais dont les pointes ne se touchent pas », et que celle-ci rencontre quelques difficultés dans la procédure en annulation de cette marque communautaire

Les emblèmes étatiques constituent des obstacles absolus à une demande de marque communautaire. L’intérêt de l’arrêt du 15 janvier 2013  est encore plus grand quand il s’agit de l’emblème de l’Union Européenne et qu’il s’applique à l’action de la Commission européenne qui a eu quelques difficultés avec la procédure en annulation de la marque communautaire. Affaire T‑413/11, Welte-Wenu GmbH contre (OHMI) et en intervention : la Commission européenne

 

4 avril 2001 : Welte-Wenu GmbH dépose la marque communautaire sur le signe figuratif suivant :

Pour

–        classe 7 : « Arbres de transmission et pièces de rechange pour arbres de transmission pour véhicules et machines, autres que pour véhicules terrestres » ;

–        classe 12 : « Arbres de transmission et pièces de rechange pour arbres de transmission pour véhicules terrestres ».

8 octobre 2001 : publication de la demande de marque communautaire.

9 avril 2002 : enregistrement de la marque communautaire.

4 février 2009 : La Commission des communautés européennes engage devant l’OHMI une action en nullité de la marque en invoquant que la marque en cause consistait en une « imitation au point de vue héraldique » des emblèmes dont le drapeau de l’Union européenne et le logo

30 juin 2010 : la division d’annulation rejette la demande de la Commission.

17 août 2010 : recours de la Commission.

12 mai 2011 : la première chambre de recours de l’OHMI annule la décision de la division d’annulation et annule la marque communautaire.

Recours de Welte-Wenu GmbH que le Tribunal va rejeter sauf pour la condamnation d’une partie des dépens.

 

  • Quelques problèmes de procédure pour la Commission : Welte-Wenu GmbH conteste que la Commission ait dès sa demande initiale fondée correctement sa demande sur « la probabilité de l’établissement, par le public concerné, d’un lien entre la marque visée par la demande en cause et l’organisation internationale intergouvernementale concernée ».

 

22      En l’espèce, il convient de relever qu’il résulte de la lecture de la demande en nullité, telle qu’elle figure dans le dossier de la procédure devant l’OHMI transmis au Tribunal en application de l’article 133, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, que la Commission avait bien invoqué, à l’appui de sa demande, la possibilité de l’établissement d’un lien, par le public concerné, entre les produits visés par la marque en cause et l’Union. En particulier, la Commission a relevé que la couronne d’étoiles, l’arrangement de couleurs et le mot « european » (européen), utilisés dans la marque en cause, étaient de nature à tromper le public qui pouvait croire que les « services » protégés provenaient de l’Union ou d’une entité autorisée par celle‑ci, ou qu’ils étaient contrôlés ou garantis par l’Union. Cette argumentation est d’ailleurs résumée par la division d’annulation, au point 6 de sa décision. Il résulte en outre du point 29 de la même décision, que la division d’annulation a compris que l’allusion de la Commission à des « services », alors que la marque en cause ne visait que des produits, résultait d’une erreur évidente et qu’il convenait de comprendre l’argumentation de la Commission en ce sens qu’elle visait la possibilité de l’établissement d’un lien, par le public pertinent, entre les produits visés par la marque en cause et l’Union européenne.

23      Il résulte également de la lecture de la demande en nullité de la Commission, que celle‑ci avait fait référence, à l’appui de son argumentation, à l’arrêt du Tribunal du 21 avril 2004, Concept/OHMI (ECA) (T‑127/02, Rec. p. II‑1113; ci‑après l’ « arrêt ECA »). Toutefois, en raison d’une autre erreur évidente, elle a indiqué qu’il s’agissait d’un arrêt de la Cour et elle a fait référence à un numéro d’affaire inexact (C‑127/02). La division d’annulation a, néanmoins, compris que la Commission invoquait l’arrêt ECA et, au point 29 de sa décision, elle a rectifié les erreurs de la Commission en indiquant la citation correcte de cet arrêt.

24      Il convient de rappeler également que, ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, l’article 76 du règlement n° 207/2009, au même titre que l’article 74 du règlement n° 40/94, qui était applicable au moment de la présentation de la demande en nullité de la Commission et dont le contenu est identique, ne fait pas obstacle à ce que les instances de l’OHMI fondent leur décisions, outre sur les faits et les preuves présentés par les parties, sur des faits notoires

……

26      Il est certes vrai que, pour démontrer la probabilité que le public établisse un lien entre les produits visés par la marque en cause et l’Union européenne, elle s’est bornée à faire référence à « la grande variété des services et des produits que peuvent offrir le Conseil de l’Europe et l’Union européenne » en renvoyant, à cet égard, à l’arrêt ECA, point 23 supra, sans avancer une autre preuve de cette dernière affirmation. Toutefois, ainsi qu’il ressort, précisément, de l’arrêt ECA, point 23 supra (point 68), cette affirmation était fondée sur un fait notoire qui peut être considéré comme prouvé sans référence à des éléments concrets.

…..

33      S’agissant de la directive 2007/46, il est certes exact que la Commission ne l’avait pas évoquée dans la demande en nullité et qu’elle y a fait référence, pour la première fois, dans son mémoire devant la chambre de recours. Il n’en reste pas moins que cette directive ne saurait être regardée comme un élément de preuve que les parties devant la chambre de recours doivent produire en temps utile. Cette directive, publiée au Journal officiel de l’Union européenne, constitue un élément du droit de l’Union et fait, dès lors, partie des données de droit dont les parties peuvent faire état à n’importe quel stade de la procédure devant l’OHMI et que ce dernier non seulement peut, mais, le cas échéant, doit prendre en considération d’office….. Bien que cette directive ne porte pas sur le droit de la propriété intellectuelle, mais sur la réception des véhicules à moteur et de leurs composants, l’OHMI, qui, aux termes de l’article 115, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, est un organisme de l’Union, ne saurait être censé ignorer le droit de l’Union.

 

  • L’héraldisme s’accompagne d’une description « Sur fond azur, un cercle composé de douze étoiles d’or à cinq rais dont les pointes ne se touchent pas ». Comment apprécier le risque de confusion entre l’azur et le bleu ? Mais l’héraldisme ne distingue pas les tons des couleurs.

37      L’interdiction d’imitation d’un emblème concerne cependant uniquement les imitations de celui-ci du point de vue héraldique, c’est‑à‑dire celles qui réunissent les connotations héraldiques qui distinguent l’emblème des autres signes. Ainsi, la protection contre toute imitation du point de vue héraldique se réfère non à l’image en tant que telle, mais à son expression héraldique. Aussi y a‑t‑il lieu, afin de déterminer si la marque comprend une imitation du point de vue héraldique, de considérer la description héraldique de l’emblème en cause. Il y a toutefois lieu de préciser que toute différence entre la marque concernée et l’emblème, détectée par un spécialiste de l’art héraldique, ne sera pas nécessairement perçue par le consommateur moyen qui, en dépit de différences au niveau de certains détails héraldiques, peut voir dans la marque une imitation de l’emblème en question…

….

39      En l’espèce, la chambre de recours a commencé par procéder, aux points 32 à 41 de la décision attaquée, à une comparaison entre l’emblème QO 0927 reproduit au point 8 ci‑dessus (ci‑après, le « drapeau européen ») et la marque en cause. Elle s’est d’abord référée à la description héraldique du drapeau européen telle que produite par la Commission. Cette description, qui figure également au point 43 de l’arrêt ECA, point 23 supra, est rédigée en les termes suivants :

« Sur fond azur, un cercle composé de douze étoiles d’or à cinq rais dont les pointes ne se touchent pas. »

….

41      Au point 34 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé ce qui suit :

« Dans le domaine de l’héraldique, la couleur ‘bleue’ existe ; c’est donc la même couleur qui est utilisée dans les deux cas. La différence entre la couleur ‘azur’ et le ton de bleu utilisé par la marque communautaire attaquée est également trop insignifiante pour pouvoir, en toute hypothèse, être remarquée. »

42      C’est à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’il existait, tout au plus, une différence de couleur insignifiante entre le fond de la marque en cause et celui du drapeau européen. Il convient de noter à cet égard que, dans la terminologie héraldique anglaise et française le terme « azur » désigne la couleur bleue. En outre, l’héraldique ne distingue pas entre différents tons d’une même couleur. Ainsi, la représentation du drapeau européen avec le ton de la couleur bleu utilisée dans la marque en cause resterait fidèle à la description héraldique de cet emblème.

43      Au point 35 de la décision attaquée, la chambre de recours a poursuivi en développant les considérations suivantes, qui sont également correctes dès lors qu’elles découlent de la jurisprudence mentionnée au point 37 ci-dessus :

« D’un point de vue héraldique, la disposition des étoiles est dépourvue de signification. Toutefois, un spécialiste du domaine de l’héraldique percevra immédiatement la différence de couleur des étoiles. D’un point de vue héraldique, surtout au regard du fait que seules quatre couleurs et deux métaux sont utilisés, il existe une différence entre les cercles d’étoiles respectifs. Cette différence ne sera toutefois pas nécessairement perçue par le public ciblé ; ce dernier y verra encore moins une différence héraldique ».

44      Sur la base de ces considérations, la chambre de recours a correctement conclu, au point 41 de la décision attaquée, que le signe compris dans la marque en cause constituait une imitation, au se sens de l’article 6 ter, paragraphe 1, sous a), de la convention de Paris, du drapeau européen. Cette conclusion n’est d’ailleurs pas spécifiquement contestée par la requérante.

  • Le lien entre la marque en cause et l’Union et le Conseil de l’Europe retenu par la Chambre de Recours

46      Pour parvenir à cette conclusion, la chambre de recours s’est d’abord référée, au point 43 de la décision attaquée, à la directive 2007/46, et elle a mis en exergue le fait que cette directive établissait un cadre harmonisé contenant les dispositions administratives et les exigences techniques applicables à la réception des véhicules neufs relevant de son champ d’application, ainsi que des systèmes, composants et entités techniques destinés à ces véhicules. Elle a également souligné que cette directive contenait aussi des dispositions applicables à la vente et à la mise en service des pièces et des équipements destinés à des véhicules réceptionnés et que, aux fins de son application, des exigences techniques spécifiques concernant la construction et le fonctionnement des véhicules étaient fixées dans des actes réglementaires. …

  • Sur l’examen global de la marque, la présence de ce drapeau élargit le risque de confusion

64      ……. Il convient en effet de relever que ni l’existence des deux éléments verbaux de la marque en cause ni l’image du croisillon au milieu de cette marque ne sont de nature à exclure l’établissement, par le public visé, d’un lien entre, d’une part, la requérante et les produits couverts par la marque en cause et, d’autre part, les institutions, les organes ou les organismes de l’Union ou d’une autre organisation internationale intergouvernementale qui utilise le drapeau européen. L’image du croisillon sera, sans doute, perçue par le public comme une allusion directe aux produits couverts par la marque en cause. Quant aux éléments verbaux, ils sont de nature à rendre plus probable l’établissement, dans l’esprit du public, d’un lien entre les produits en cause et l’Union. Tel est, en particulier, le cas du terme « services » qui, compte tenu également du fait que la marque en cause ne vise que des produits, pourrait être perçu comme une référence à des services d’homologation, de contrôle de qualité ou de garantie des produits couverts par la marque en cause, fournis par une agence officielle de l’Union. Le terme « european », qui fait partie de la dénomination de plusieurs institutions, organes ou organismes de l’Union, est également de nature à renforcer cette probabilité.

..

68      Doit également être rejeté l’argument de la requérante, selon lequel le public professionnel pertinent connaît la marque en cause et est conscient du fait qu’elle renvoie à la requérante. Il convient d’emblée de relever que si, certes, la requérante a avancé cet argument également durant la procédure devant les instances de l’OHMI, elle ne l’a étayé d’aucun élément de preuve. Or, à défaut de tels éléments, l’affirmation d’une connaissance généralisée du fait que la marque en cause renvoie à la requérante ne peut pas être admise. Contrairement à ce que semble considérer la requérante, le seul fait que la marque en cause figurait sur le registre des marques communautaires depuis 2002 n’est pas suffisant à cet égard, faute de preuves d’une utilisation réelle de ladite marque pendant cette période. En tout cas, ce qui importe, du point de vue de l’application de l’article 6 ter, paragraphe 1, sous c), de la convention de Paris, est la connaissance de l’absence de tout lien entre la requérante et ses produits, d’une part, et l’Union, d’autre part. Or, en raison de la présence dans la marque en cause d’une imitation du drapeau européen, même les membres du public pertinent conscients de ce que cette marque renvoie à la requérante et à ses produits pourraient être amenés à croire que ces produits bénéficient d’une approbation ou d’une garantie de l’Union.

Marque enregistrée et caractère trompeur, une basse-cour n’est pas qu’un bâtiment où sont enfermées les poules.

Le choix d’une marque ne se limite pas à apprécier sa validité au regard des critères du Code de la Propriété intellectuelle.

Les circonstances de l’emploi d’une marque même enregistrée peuvent être qualifiées du délit de publicité mensongère prévu par l’article L. 121-1 du code de la consommation (ancien) et de pratiques commerciales trompeuses au sens de l’article L. 121-1 2° b du même code.

Une illustration en est donnée par l’arrêt du 4 décembre 2012 de la Chambre criminelle de la Cour de cassation qui rejette le pourvoi contre l’arrêt d’appel de RENNES, chambre correctionnelle, en date du 26 janvier 2012 où la marque déposée est « les oeufs de basse-cour », dénomination pour laquelle les dictionnaires donnent des définitions sensiblement différentes.

Nous en reprenons les termes.

« la SAS ….  dont M. X… est le représentant légal, a commercialisé entre le 2 novembre et le 24 décembre 2007, dans les départements des Côtes d’Armor, du Finistère et du Morbihan, des oeufs issus de « poules élevées au sol », selon la définition et les conditions fixées pour ce mode d’élevage par la règlementation européenne- dans des emballages comportant :
– le logo « l’oeuf de nos villages » représentant un oeuf entouré d’épis de blé,
– une image centrale représentant deux poules évoluant sur un sol sableux ou gravillonné de couleur marron, précédée au-dessus, de la dénomination en arc de cercle et en lettres majuscules de 10 et 8 mm, «les oeufs de basse-cour», et suivie au-dessous de l’image, dans la même forme et en lettres majuscules de 7 mm, de la mention obligatoire exigée par le règlement CE : « poules élevées au sol » ; que si la SAS ….. justifie avoir modifié à la suite de sa précédente condamnation, la présentation des emballages utilisés pour la commercialisation des œufs issus de « poules élevées au sol », en supprimant, d’une part, l’image de l’éleveur portant une poule dans ses bras et la phrase, « dans nos élevages, nos poules s’ébrouent, volent, déambulent, grattent, se perchent et accèdent librement à leur nid », et en modifiant, d’autre part, le style, les caractères et la forme de la mention « poules élevées au sol  … [ Elle ]a maintenu dans sa nouvelle présentation, la dénomination « les oeufs de basse-cour »

Or, les normes de commercialisation des oeufs fixées par le règlement CE, distinguent quatre catégories d’oeufs en fonction des conditions de vie et du mode d’élevage des poules pondeuses ; qu’il existe ainsi selon ces normes :
– les oeufs de poules élevées sous le mode agrobiologique,
– les oeufs de poules élevées en plein air,
– les oeufs de poules élevées au sol,
– les oeufs de poules élevées en cage.
que chaque type d’élevage présente ainsi des caractéristiques différentes, en fonction des conditions de vie minimales des poules et de leur alimentation, qui sont strictement définies par le règlement. »

Mais la dénomination « les oeufs de basse-cour » est une marque déposée à l’INPI, et un des moyens du pourvoi porte sur l’existence de cet enregistrement :

« 2) alors que l’utilisation d’une marque déposée à l’INPI n’est susceptible de constituer une pratique commerciale trompeuse que lorsque les signes de la marque sont, en eux-mêmes, susceptibles d’induire le consommateur en erreur sur l’origine ou les qualités substantielles du bien ; que tel n’est pas le cas du terme «basse-cour», lequel renvoie, selon les propres constatations de l’arrêt attaqué au bâtiment dans lequel sont hébergées les volailles, ce qui représente la caractéristique essentielle de l’élevage au sol ; qu’en affirmant, néanmoins, que la dénomination « les oeufs de basse-cour » était susceptible de tromper le consommateur sur les caractéristiques essentielles du mode de production des oeufs de poules élevées au sol, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et privé sa décision de toute base légale’

Le pourvoi est rejeté contre l’arrêt de la Cour qui avait confirmé le jugement :

« que le tribunal a justement retenu en l’espèce que le maintien sur les emballages d’oeufs issus de « poules élevées au sol », de la dénomination « les oeufs de basse-cour », apposée, au dessus de l’image représentant deux poules seules évoluant sur un sol sableux ou gravillonné, était de nature à induire les consommateurs en erreur et à créer notamment une confusion entre deux catégories d’..ufs issus de modes d’élevage distincts à savoir, les oeufs issus de « poules élevées au sol », et les oeufs de « poules élevées en plein air » ; qu’en effet, si le terme « basse cour » peut s’employer pour désigner le bâtiment dans lequel sont hébergées les volailles, il évoque aussi au sens commun du terme et dans le langage courant, la cour de la ferme ou du bâtiment qui dans l’élevage traditionnel, permet aux poules d’évoluer en liberté sur un espace de plein air ; que si le laboratoire d’analyse de la langue française se réfère seulement, pour la définition du terme « basse cour », à la notion de bâtiment, les dictionnaires usuels « Larousse » et « Littré », emploient à la fois pour définir la «basse-cour», les deux termes de « cour » et « bâtiment », précisant ainsi dans leur définition : « cour, bâtiment d’une ferme… » (Larousse) ou «ensemble de bâtiments et cours… » (Littré) ; que la dénomination « les oeufs de basse-cour » – que la SAS ……  reconnaît apposer sur les seuls emballages réservés à la commercialisation des oeufs issus des «poules élevées au sol » – présente au regard notamment de ces deux définitions, un caractère manifestement équivoque, qui est susceptible de créer une confusion entre le mode d’élevage des « poules élevées en plein air » et le mode d’élevage des « poules élevées au sol », dès lors que si cette dénomination peut évoquer « le bâtiment » où est hébergé la volaille, qui est la caractéristique essentielle de l’élevage au sol, elle évoque aussi « la cour », c’est-à-dire « un espace de plein air » qui est la caractéristique essentielle de l’élevage « de plein air » permettant précisément de la différencier de l’élevage « au sol » ; qu’en effet, si ces deux modes d’élevage ont des caractéristiques communes tenant notamment, aux conditions d’hébergement des poules au sein d’un bâtiment clos, leurs caractéristiques essentielles obéissent à des règles strictement différentes ; que les « poules élevées au sol » vivent en claustration à la lumière artificielle, dans un bâtiment fermé d’où elles ne sortent jamais alors que « poules élevées en plein air », si elles sont aussi hébergées dans un bâtiment, peuvent sortir à l’extérieur et accéder à un espace clos, de « plein air » sur lequel elles peuvent à l’air libre, déambuler en liberté, gratter et picorer ; que par conséquent, la référence faite par la SAS …. à la notion de « basse-cour » sur les emballages des oeufs issus de « poules élevées au sol », renforcée par l’image de deux poules paraissant évoluer seules, en liberté, sur un sol sableux, tend à accréditer l’idée – contrairement aux véritables conditions de vie des poules « élevées au sol », qui sont enfermées dans un bâtiment- que les oeufs qu’elle commercialise sous la dénomination « les oeufs de basse-cour », sont issus d’un élevage plus respectueux de la tradition, dans lequel les poules peuvent quitter leur bâtiment et accéder à un espace clos de « plein air », comme dans l’élevage de « plein air » et à créer ainsi une confusion dans l’esprit du consommateur entre deux modes de production différents ».

Dépôt de marque à l’INPI : une signature scannée ne remplit pas les exigences de la signature électronique

Le dépôt de marque par voie électronique s’est généralisé devant les offices de propriété industrielle.

Un arrêt du 12 décembre 2012 de la  Cour d’Appel de Fort de France attire l’attention sur le soin à apporter à ce dépôt de marque par voie électronique à l’INPI en particulier sur sa signature par le déposant  ou son mandataire.

 

M. X dépose une marque. L’arrêt indique que ce dépôt a été effectué sans signature électronique.

9 janvier 2012, l’INPI demande de régulariser cette demande d’enregistrement par une signature manuscrite. Mais cette  régularisation n’intervient pas.

25 avril 2012, Le Directeur de l’INPI rejette la demande d’enregistrement

D’où le recours de M . X ….. que la Cour rejette :

« Lors des vérifications effectuées sur la demande déposée par Maxime X… par voie électronique, il a été relevé que cette demande n’était pas revêtue de la signature électronique (absence de production de certificat électronique). Invité à régulariser en transmettant par voie postale une version imprimée revêtue de cette signature manuscrite, Maxime X… s’est alors contenté de retourner un exemplaire revêtu d’une signature scannée. Si la mention écrite par la partie qui s’engage n’est plus nécessairement manuscrite, elle doit toutefois résulter des procédés d’identification conformes aux règles qui gouvernent la signature électronique ; or, la seule signature scannée de Maxime X… est insuffisante pour s’assurer de l’authenticité de son engagement juridique comme ne permettant pas une parfaite identification du signataire ; aussi faute par le requérant d’avoir régularisé sa demande dans les formes et délais requis, son recours sera rejeté …… »

La marque communautaire est enfin libérée des frontières des Etats par l’arrêt du 19 décembre 2012 de la Cour de Justice

Le 19 décembre 2012, la Cour de Justice a rendu un arrêt sur « l’usage sérieux » de l’article 15 paragraphe 1 du règlement communautaire n° 207/2009.

Affaire C‑149/11, sur une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Gerechtshof te ’s-Gravenhage (Pays-Bas), par décision du 1er février 2011, parvenue à la Cour le 28 mars 2011, dans la procédure Leno Merken BV contre

Hagelkruis Beheer BV,

Cet arrêt est important en ce qu’il dit clairement qu’en matière de marque communautaire il n’y a pas lieu de tenir compte des frontières des États.

 

28      La Cour a déjà interprété la notion d’«usage sérieux» dans le cadre de l’appréciation de l’usage sérieux des marques nationales dans les arrêts précités Ansul et Sunrider/OHMI ainsi que dans l’ordonnance La Mer Technology, précitée, en considérant qu’il s’agit d’une notion autonome du droit de l’Union qui doit recevoir une interprétation uniforme.

29      Il résulte de cette jurisprudence qu’une marque fait l’objet d’un «usage sérieux» lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque. L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci dans la vie des affaires, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque (arrêts, précités Ansul, point 43, et Sunrider/OHMI, point 70, ainsi que ordonnance La Mer Technology, précitée, point 27).

30      La Cour a également relevé que l’importance territoriale de l’usage n’est que l’un des facteurs, parmi d’autres, devant être pris en compte pour déterminer si cet usage est sérieux ou non (voir arrêt Sunrider/OHMI, précité, point 76).

31      Cette interprétation est applicable par analogie aux marques communautaires dans la mesure où, en exigeant qu’un usage sérieux soit fait de la marque, la directive 2008/95 et le règlement n° 207/2009 poursuivent le même objectif.

32      En effet, il résulte tant du considérant 9 de ladite directive que du considérant 10 dudit règlement que le législateur de l’Union a entendu soumettre le maintien des droits liés à la marque, respectivement, nationale et communautaire, à la condition qu’elle soit effectivement utilisée. Ainsi que le relève Mme l’avocat général aux points 30 et 32 de ses conclusions, une marque communautaire qui n’est pas utilisée pourrait faire obstacle à la concurrence en limitant l’éventail des signes qui peuvent être enregistrés par d’autres en tant que marque et en privant les concurrents de la possibilité d’utiliser cette marque ou une marque similaire lors de la mise sur le marché intérieur de produits ou de services identiques ou similaires à ceux qui sont protégés par la marque en cause. Par conséquent, le non-usage d’une marque communautaire risque également de restreindre la libre circulation des marchandises et la libre prestation des services.

33      Il convient toutefois de tenir compte, lors de l’application par analogie aux marques communautaires de la jurisprudence rappelée au point 29 du présent arrêt, de la différence entre l’étendue territoriale de la protection conférée aux marques nationales et celle de la protection accordée aux marques communautaires, différence qui résulte, d’ailleurs, du libellé des dispositions relatives à l’exigence d’usage sérieux respectivement applicables à ces deux types de marques.

34      Ainsi, d’une part, l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 dispose que, «si, dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque communautaire n’a pas fait l’objet par le titulaire d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque communautaire est soumise aux sanctions prévues au présent règlement, sauf juste motif pour le non-usage». D’autre part, l’article 10 de la directive 2008/95 pose en substance la même règle s’agissant des marques nationales, tout en prévoyant qu’elles doivent faire l’objet d’un usage sérieux «dans l’État membre concerné».

35      Cette différence quant à l’étendue territoriale de l’«usage sérieux» entre les deux régimes des marques est soulignée, en outre, par l’article 42, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009. Celui-ci prévoit que la règle énoncée au paragraphe 2 du même article, à savoir que, en cas d’opposition, le demandeur d’une marque communautaire peut requérir la preuve que la marque communautaire antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans la Communauté, est également applicable aux marques nationales antérieures, «étant entendu que l’usage dans la Communauté est remplacé par l’usage dans l’État membre où la marque nationale antérieure est protégée».

36      Il convient cependant d’observer que, ainsi qu’il découle de la jurisprudence rappelée au point 30 du présent arrêt, l’étendue territoriale de l’usage constitue non pas un critère distinct de l’usage sérieux, mais l’une des composantes de cet usage, qui doit être intégrée dans l’analyse globale et être étudiée parallèlement aux autres composantes de celui-ci. À cet égard, les termes «dans la Communauté» visent à préciser le marché géographique de référence pour toute analyse de l’existence d’un usage sérieux d’une marque communautaire.

37      Il y a donc lieu, afin de répondre aux questions posées, de rechercher ce que recouvre l’expression d’«usage sérieux dans la Communauté», au sens de l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009.

38      Le libellé de ladite disposition ne contient aucune référence au territoire des États membres. En revanche, il ressort clairement de celle-ci que la marque communautaire doit être utilisée dans la Communauté, ce qui signifie, en d’autres termes, que l’usage de cette marque dans des États tiers ne peut pas être pris en compte.

39      En l’absence d’autres précisions dans l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, il convient de tenir compte du contexte dans lequel s’inscrit cette disposition ainsi que du système établi par la réglementation en cause et des objectifs poursuivis par celle-ci.

40      S’agissant des objectifs poursuivis par le règlement n° 207/2009, il résulte d’une lecture combinée de ses considérants 2, 4 et 6 que celui-ci vise à lever l’obstacle de la territorialité des droits que les législations des États membres confèrent aux titulaires des marques en permettant aux entreprises d’adapter leurs activités économiques aux dimensions de la Communauté et de les exercer sans entraves. La marque communautaire permet ainsi à son titulaire d’identifier ses produits ou ses services de manière identique dans l’ensemble de la Communauté, sans considération des frontières. En revanche, les entreprises qui ne désirent pas une protection de leurs marques à l’échelle de la Communauté peuvent choisir d’utiliser des marques nationales, sans être obligées de déposer leurs marques en tant que marques communautaires.

41      Pour réaliser ces objectifs, le législateur de l’Union a prévu, à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, lu conjointement avec le considérant 3 de celui-ci, que la marque communautaire a un caractère unitaire, qui se traduit par le fait qu’elle jouit d’une protection uniforme et produit les mêmes effets sur l’ensemble du territoire de la Communauté. Elle ne peut, en principe, être enregistrée ou transférée, faire l’objet d’une renonciation, d’une décision de déchéance des droits de son titulaire ou de nullité et son usage ne peut être interdit que pour l’ensemble de la Communauté.

42      La finalité du système des marques communautaires est donc, ainsi que cela ressort du considérant 2 de ce règlement, d’offrir sur le marché intérieur des conditions analogues à celles qui existent dans un marché national. Dans ce contexte, considérer qu’il convient de conférer, dans le cadre du régime communautaire des marques, une signification particulière aux territoires des États membres ferait échec à la réalisation des objectifs précisés au point 40 du présent arrêt et porterait préjudice au caractère unitaire de la marque communautaire.

43      Certes, il résulte de l’examen systématique du règlement n° 207/2009 qu’il est fait référence au territoire de l’un ou de plusieurs États membres dans le texte de certaines de ses dispositions. Cependant, il importe de relever que de telles références sont faites notamment dans le contexte de marques nationales, dans les dispositions relatives à la compétence et à la procédure concernant les actions en justice portant sur les marques communautaires ainsi que dans les règles portant sur l’enregistrement international, alors que l’expression «dans la Communauté» est généralement utilisée en relation avec les droits conférés par la marque communautaire.

44      Il résulte des considérations qui précèdent que, pour apprécier l’existence d’un «usage sérieux dans la Communauté», au sens de l’article 15, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, il convient de faire abstraction des frontières du territoire des États membres.

45      Cette interprétation ne saurait être infirmée par la déclaration commune dont il a été fait état au point 23 du présent arrêt et aux termes de laquelle «un usage sérieux au sens de l’article 15 dans un seul pays constitue un usage sérieux dans la Communauté» ni par les directives de l’OHMI relatives à la procédure d’opposition qui contiennent en substance la même règle.

46      D’une part, quant à la déclaration commune, il ressort d’une jurisprudence constante que, lorsqu’une déclaration inscrite à un procès-verbal du Conseil ne trouve aucune expression dans le texte d’une disposition de droit dérivé, elle ne saurait être retenue pour l’interprétation de cette dernière (voir arrêts du 26 février 1991, Antonissen, C‑292/89, Rec. p. I-745, point 18; du 6 mai 2003, Libertel, C‑104/01, Rec. p. I‑3793, point 25; du 10 janvier 2006, Skov et Bilka, C-402/03, Rec. p. I-199, point 42, ainsi que du 19 avril 2007, Farrell, C‑356/05, Rec. p. I‑3067, point 31).

47      Le Conseil et la Commission ont d’ailleurs expressément reconnu cette limitation dans le préambule de ladite déclaration, selon laquelle «[l]es déclarations du Conseil et de la Commission dont le texte figure ci-dessous ne faisant pas partie du texte législatif, elles ne préjugent pas de l’interprétation de ce dernier par la Cour».

48      D’autre part, en ce qui concerne les directives de l’OHMI, il y a lieu de relever que celles-ci ne constituent pas des actes juridiques contraignants pour l’interprétation des dispositions du droit de l’Union.

49      De même, l’affirmation, avancée par certains intéressés ayant déposé des observations dans le cadre de la présente procédure, selon laquelle l’étendue territoriale de l’usage d’une marque communautaire ne peut en aucun cas être limitée au territoire d’un seul État membre ne saurait non plus prospérer. Cette affirmation est fondée sur l’article 112, paragraphe 2, sous a), du règlement no 207/2009 aux termes duquel il est possible de transformer une marque communautaire, dont le titulaire a été déchu de ses droits pour défaut d’usage, en une demande de marque nationale si, «dans l’État membre pour lequel la transformation a été demandée[,] la marque communautaire [a été] utilisée dans des conditions qui constituent un usage sérieux au sens de la législation dudit État membre».

50      Or, s’il est certes justifié de s’attendre à ce qu’une marque communautaire, en raison du fait qu’elle jouit d’une protection territoriale plus étendue qu’une marque nationale, fasse l’objet d’un usage sur un territoire plus vaste que celui d’un seul État membre pour que celui-ci puisse être qualifié d’«usage sérieux», il n’est pas exclu que, dans certaines circonstances, le marché des produits ou des services pour lesquels une marque communautaire a été enregistrée soit, de fait, cantonné au territoire d’un seul État membre. Dans un tel cas, un usage de la marque communautaire sur ce territoire pourrait répondre tout à la fois à la condition de l’usage sérieux d’une marque communautaire et à celle de l’usage sérieux d’une marque nationale.

51      Ainsi que l’a souligné Mme l’avocat général au point 63 de ses conclusions, ce n’est que dans le cas où une juridiction nationale jugerait, compte tenu de toutes les circonstances de la cause, que l’usage dans un État membre était insuffisant pour constituer un usage sérieux dans la Communauté qu’il serait encore possible de transformer la marque communautaire en une demande de marque nationale, en application de l’exception prévue à l’article 112, paragraphe 2, sous a), du règlement no 207/2009.

52      Certains intéressés ayant soumis leurs observations à la Cour soutiennent également que, même s’il est fait abstraction des frontières des États membres au sein du marché intérieur, la condition de l’usage sérieux d’une marque communautaire exige que celle-ci soit utilisée sur une partie substantielle du territoire de la Communauté, ce qui peut correspondre au territoire d’un État membre. Un tel critère résulterait, par analogie, des arrêts du 14 septembre 1999, General Motors (C‑375/97, Rec. p. I‑5421, point 28); du 22 novembre 2007, Nieto Nuño (C‑328/06, Rec. p. I‑10093, point 17), et du 6 octobre 2009, PAGO International (C‑301/07, Rec. p. I‑9429, point 27).

53      Cette argumentation ne saurait non plus être retenue. D’une part, ladite jurisprudence concerne l’interprétation des dispositions relatives à la protection élargie conférée aux marques jouissant d’une renommée ou d’une notoriété dans la Communauté ou au sein de l’État membre dans lequel elles ont été enregistrées. Or, ces dispositions poursuivent un objectif différent de l’exigence de l’usage sérieux, laquelle pourrait avoir pour conséquence le rejet de l’opposition ou même la déchéance de la marque, tel que prévu notamment à l’article 51 du règlement no 207/2009.

54      D’autre part, s’il est certes raisonnable de s’attendre à ce qu’une marque communautaire soit utilisée sur un territoire plus important que les marques nationales, il n’est pas nécessaire que cet usage soit géographiquement étendu pour être qualifié de sérieux, car une telle qualification dépend des caractéristiques du produit ou du service concerné sur le marché correspondant (voir, par analogie, en ce qui concerne l’étendue quantitative de l’usage, arrêt Ansul, précité, point 39).

55      Dès lors que l’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque repose sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à démontrer que l’exploitation commerciale de cette marque permet de créer ou de conserver les parts de marché pour les produits ou les services pour lesquels elle a été enregistrée, il est impossible de déterminer a priori, de façon abstraite, quelle étendue territoriale devrait être retenue pour déterminer si l’usage de ladite marque a ou non un caractère sérieux. Une règle de minimis, qui ne permettrait pas au juge national d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui lui est soumis, ne peut donc être fixée (voir, par analogie, ordonnance La Mer Technology, précitée, points 25 et 27, ainsi que arrêt Sunrider/OHMI, précité, points 72 et 77).

56      S’agissant de l’usage de la marque communautaire en cause dans l’affaire au principal, la Cour ne dispose pas des éléments factuels nécessaires lui permettant de donner à la juridiction de renvoi des indications plus concrètes quant à l’existence d’un usage sérieux ou non de ladite marque. Ainsi qu’il découle des considérations qui précèdent, il appartient à cette juridiction d’apprécier si la marque en cause est utilisée conformément à sa fonction essentielle et en vue de créer ou de conserver des parts de marché pour les produits ou les services protégés. Cette appréciation doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances pertinents au principal, tels que notamment les caractéristiques du marché en cause, la nature des produits ou des services protégés par la marque, l’étendue territoriale et quantitative de l’usage ainsi que la fréquence et la régularité de ce dernier.

57      Il convient, dès lors, de répondre aux questions posées que l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 doit être interprété en ce sens que, pour apprécier l’exigence de l’«usage sérieux dans la Communauté» d’une marque au sens de cette disposition, il convient de faire abstraction des frontières du territoire des États membres.

58      Une marque communautaire fait l’objet d’un «usage sérieux», au sens de l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, lorsqu’elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle et en vue de maintenir ou de créer des parts de marché dans la Communauté pour les produits ou les services désignés par ladite marque. Il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier si les conditions sont remplies dans l’affaire au principal, en tenant compte de l’ensemble des faits et des circonstances pertinents tels que, notamment, les caractéristiques du marché en cause, la nature des produits ou des services protégés par la marque, l’étendue territoriale et quantitative de l’usage ainsi que la fréquence et la régularité de ce dernier.

Tout n’est pas savoir–faire comme le rappelle la Cour de cassation le 18 décembre 2012

Le savoir–faire est généralement invoqué en l’absence de droit de propriété industrielle. Mais à quoi peut-il s’appliquer effectivement ?

L’arrêt du 18 décembre 2012 ne nous définit pas l’objet d’un savoir-faire, il nous donne simplement une indication sur ce qui ne constitue pas du savoir-faire.

Fromageries Bel qui commercialise depuis 1979 des fromages en portion « Mini Babybel », a poursuivi Fromageries Rambol, et Bongrain pour des actes de concurrence déloyale et de parasitisme à son égard.

La Cour de Paris le 25 février 2011 a rejeté ses demandes.

Formagerie Bel se pourvoit en cassation. Le pourvoi est rejeté par l’arrêt du 18 décembre 2012 .

Attendu que la société Fromageries Bel fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes au titre du parasitisme, alors, selon le moyen, que l’exercice de l’action pour parasitisme ou concurrence parasitaire n’est pas subordonné à une absence de situation de concurrence entre les parties ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil ;

Mais attendu que l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la seule présentation d’un produit dans un filet auquel est fixé une étiquette ne saurait caractériser l’existence d’un savoir-faire, ni celle d’un travail intellectuel et qu’elle n’est pas constitutive de parasitisme, cette forme de présentation, d’un usage ancien et banal dans ce secteur, étant déjà connue pour d’autres produits alimentaires et son application au fromage ne constituant qu’une idée ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, et abstraction faite du motif surabondant justement critiqué par le moyen, la cour d’appel a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n’est pas fondé ;

Et attendu que le premier moyen ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

En 2013, le juge français pourra-t-il se prononcer sur des actes de contrefaçon quand ceux-ci ont leur origine à l’étranger ?

Quand des faits litigieux ont eu lieu à l’étranger : le juge français peut-il encore se prononcer dans l’attente de la réponse de la CJUE aux questions préjudicielles posées par l’arrêt du 5 avril 2012 de la Cour de cassation ? la Cour de cassation répond par la négative le 20 décembre 2012.

 

  • Par son arrêt du 5 avril 2012, la Cour de cassation a posé différentes questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’Union Européenne

 

1°) L’article 5, point 3, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution de décisions en matière civile et commerciale, doit-il être interprété en ce sens qu’en cas d’atteinte alléguée aux droits patrimoniaux d’auteur commise au moyen de contenus mis en ligne sur un site Internet,

– la personne qui s’estime lésée a la faculté d’introduire une action en responsabilité devant les juridictions de chaque Etat membre sur le territoire duquel un contenu mis en ligne est accessible ou l’a été, à l’effet d’obtenir réparation du seul dommage causé sur le territoire de l’Etat membre de la juridiction saisie,

ou

– il faut, en outre, que ces contenus soient ou aient été destinés au public situé sur le territoire de cet Etat membre, ou bien qu’un autre lien de rattachement soit caractérisé ?

2°) La question posée au 1°) doit-elle recevoir la même réponse lorsque l’atteinte alléguée aux droits patrimoniaux d’auteur résulte non pas de la mise en ligne d’un contenu dématérialisé, mais, comme en l’espèce, de l’offre en ligne d’un support matériel reproduisant ce contenu ?

 

Ce blog en avait parlé ici

 

  • Dans l’attente de cet arrêt, la Cour de cassation par son arrêt du 20 décembre 2012 sursoit à statuer dans une affaire où il était également question d’une atteinte à des droits d’auteur

 

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 1er juin 2011), que M. Samuel X…, ayant droit de Guy X…, photographe, prétendant que la société Britsh Broadcasting Corporation, ci-après BBC, avait diffusé sur la chaîne BBC 4 un documentaire reproduisant plusieurs oeuvres de Guy X… ainsi qu’une oeuvre de M. Y… inspirée d’une oeuvre du photographe, et que des extraits du documentaire étaient accessibles en ligne sur le site de partage  » You Tube « , a assigné en contrefaçon les sociétés BBC et BBC 4, et M. Y… ;

Attendu que M. Samuel X… fait grief à l’arrêt de déclarer le tribunal de grande instance de Paris territorialement incompétent alors, selon le moyen :

1°/ que l’action en contrefaçon est de nature délictuelle ; qu’en matière délictuelle, l’action est portée devant le juge du domicile du défendeur ou le juge du lieu où le fait dommageable s’est produit ; que s’agissant d’un délit par voie de diffusion hertzienne, le dommage est localisé au lieu où le programme a été diffusé ; qu’il ressort des propres constatations de l’arrêt que les programmes de la BBC sont diffusés en France par voie hertzienne et peuvent y être visionnés, sous certaines conditions (décodeur, abonnement et domiciliation au Royaume-Uni, un service de domiciliation étant généralement proposé avec l’abonnement) ; qu’en déclinant sa compétence, pour le motif inopérant que, compte tenu des restrictions à la diffusion hertzienne, celle-ci n’était pas destinée au territoire français, la cour d’appel, qui n’a pas recherché si le documentaire, dont il ressort de ses propres constatations qu’il pouvait être visionné depuis la France, y était diffusé, a privé sa décision de base légale au regard de l’article 5-3 du règlement CE 44/ 2001 du 22 décembre 2000 ;

2°/ que le juge français est compétent pour connaître des litiges liés à la diffusion sur internet d’un document destiné au public français ; que pour écarter la compétence du juge français s’agissant de la diffusion sur le site internet « youtube » du documentaire litigieux, la cour d’appel a retenu que cette diffusion n’était pas le fait de la BBC ; qu’en se prononçant à nouveau par un motif inopérant au regard de la question de la compétence, qui est préalable, la cour d’appel qui n’a pas recherché si la diffusion sur youtube était destinée au public de France, a privé sa décision de base légale au regard de l’article 5-3 du règlement CE 44/ 2001 du 22 décembre 2000 ;

……..

Sursoit à statuer dans l’attente de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne répondant aux questions préjudicielles qui lui ont été posées suivant arrêt de cette Cour du 5 avril 2012, n° 10-15. 890 ;

 

La Cour de cassation a renvoyé l’examen de cette affaire à l’audience du 23 avril 2013. A cette date, l’arrêt de la Cour de Justice sera-t-il rendu ?