Marque sur la forme d’emballage pour du beurre

Situation analogue que le post précédent pour la marque déposée pour « Beurre » et portant sur le signe :

La demande a été rejetée successivement par l’examinateur et la Chambre de recours, l’affaire vient devant le Tribunal qui rejette le recours par son arrêt du 2 avril.

Deux motifs étaient avancés par le déposant mais à la lecture de l’arrêst ces motifs apparaissent contraires aux faits par la Chambre de l’EUIPO.

la délimitation du secteur concerné

16      ….., la chambre de recours aurait fait référence à des exemples de conditionnements de produits qui ne seraient pas semblables au beurre, ne seraient pas vendus dans le même rayon que celui-ci et ne proviendraient pas des mêmes producteurs.

L’analyse du Tribunal :

   En l’espèce, dans la décision attaquée, la chambre de recours s’est fondée sur l’existence, sur le marché, de conditionnements très semblables à la marque demandée pour, d’une part, du beurre et, d’autre part, d’autres produits utilisés notamment au même moment de la journée que le beurre, c’est-à-dire surtout au petit déjeuner, tels que le lait, la tomate, ou la marmelade. En ce qui concerne le lait et la tomate, les exemples de conditionnements mentionnés par le rapporteur de la chambre de recours dans sa lettre du 5 mars 2019, reproduits au point 9 de la décision attaquée, incluent, notamment, du dulce de leche, dans le premier cas, et de la pulpe de tomate, dans le second.

31      Or, s’agissant desdits autres produits, force est de constater qu’ils sont de même nature que le beurre, étant soit des produits alimentaires à tartiner, comme le dulce de leche, la pulpe de tomate ou la marmelade, soit des produits laitiers, comme le lait pour café ou le dulce de leche. En outre, ces produits s’adressent aux mêmes consommateurs que le beurre en petites dosettes, à savoir les particuliers. Enfin, dans de tels conditionnements, ils sont habituellement consommés au petit déjeuner notamment dans des hôtels, des restaurants ou des cafés.

32      Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours s’est référée aux emballages utilisés pour ces produits dans le cadre de l’analyse de la question de savoir si la marque demandée divergeait de manière significative des habitudes du secteur.

Une divergence significative par rapport aux normes et aux habitudes du secteur concerné

34      …….. l’aluminium, la couleur dorée du conditionnement, la forme circulaire dotée d’un fond à déformation concentrique ainsi que d’une partie supérieure recevant le film d’obturation, et l’élément figuratif constitué par une vague qui apparaît en relief sur le récipient. Considérés séparément ou ensemble, de tels éléments seraient inhabituels pour le produit en question, de sorte que la chambre de recours aurait conclu à tort à une absence de divergence significative avec les normes et les habitudes du secteur.

L’analyse du Tribunal sur la vague , les autres éléments étant présents sur le marché ce que ne contestait par le déposant

   En troisième lieu, il convient d’approuver la conclusion de la chambre de recours, figurant au point 30 de la décision attaquée, selon laquelle « l’espèce de vague » apparaissant en relief sur la moitié du récipient constitutif de la marque demandée ne saurait être considérée par le public pertinent que comme un ornement, qui ne sera pas susceptible d’indiquer l’origine commerciale du produit visé par la demande d’enregistrement, puisqu’ils sont habitués à ce type d’éléments décoratifs. Il en est d’autant plus ainsi que le motif n’est pas particulièrement original ou visible. En ce qui concerne ce dernier point, force est de constater qu’il faudrait, en effet, que le récipient soit tourné du bon côté afin que le consommateur moyen du produit concerné puisse se rendre compte de l’existence même d’une telle vague

 

 

 

 

 

 

Application de la déchéance de marque aux médicaments soumis à AMM

La marque à défaut d’un usage sérieux est déchue. Cette règle est-elle valable dans les mêmes termes pour les marques pharmaceutiques ? En effet, les médicaments nécessitent souvent des études cliniques d’une durée supérieure à la période de 5 ans de non-usage du droit des marques.

La réponse est donnée par la Cour de justice dans son arrêt du 3 juillet 2019. L’arrêt

Le rappel de la règle de droit  qui prévoit de tenir compte des caractéristiques du marché

41      L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci dans la vie des affaires, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque…..

Des travaux préparatoires à une demande d’AMM ont été effectués

42      En l’occurrence, au point 36 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a relevé que les éléments produits par V….  devant l’EUIPO aux fins d’établir l’usage sérieux de la marque contestée, tels que mentionnés au point 35 de cet arrêt, permettaient de constater que V….. avait effectué des actes préparatoires, consistant en la mise en œuvre d’une procédure d’essai clinique réalisée dans la perspective du dépôt d’une demande d’AMM et incluant certains actes revêtant un caractère publicitaire à l’égard de cet essai.

43      Le Tribunal a toutefois relevé, à ce même point 36, que « seule l’obtention de l’[AMM] par les autorités compétentes était de nature à permettre un usage public et tourné vers l’extérieur, de [cette] marque » dès lors que la législation relative aux médicaments interdit la publicité pour des médicaments qui ne bénéficient pas encore d’une AMM et, partant, tout acte de communication destiné à obtenir ou à préserver une part d’un marché.

44      Le Tribunal a ajouté, aux points 37 et 38 de l’arrêt attaqué, que, s’il peut y avoir usage sérieux avant toute commercialisation des produits désignés par une marque, il n’en va ainsi qu’à condition que la commercialisation soit imminente. Or, en l’espèce, selon le Tribunal, V……  n’a pas démontré que la commercialisation d’un médicament destiné au traitement de la sclérose en plaques désigné par la marque contestée était imminente, faute pour elle d’avoir produit des éléments de preuve permettant de constater que l’essai clinique était sur le point d’aboutir.

Les essais cliniques ne constituent pas un emploi pertinent

45      Enfin, en réponse à certains arguments de V….., le Tribunal a apprécié, au point 39 de l’arrêt attaqué, les circonstances concrètes de l’utilisation de la marque contestée dans le cadre de l’essai clinique en cause et jugé, en substance, que cette utilisation relevait d’un usage interne dont il n’était pas établi que le volume fût significatif dans le secteur pharmaceutique.

46      En premier lieu, il ressort ainsi des considérations exposées par le Tribunal dans l’arrêt attaqué que celui-ci a, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 38 à 41 du présent arrêt, procédé à une appréciation concrète de l’ensemble des faits et des circonstances propres à la présente affaire afin de déterminer si les actes d’usage invoqués par V……  étaient de nature à refléter un usage de la marque contestée conforme à sa fonction d’indication d’origine des produits visés et à sa raison d’être commerciale, consistant à créer ou à conserver un débouché pour les produits pour lesquels elle avait été enregistrée.

47      S’agissant de l’argument de V…… , selon lequel le Tribunal, au point 36 de l’arrêt attaqué, a posé pour principe qu’un usage sérieux d’une marque enregistrée pour un médicament ne peut avoir lieu que lorsqu’une AMM a été accordée pour ce médicament, il convient de relever que le Tribunal s’est limité à tirer, dans le cadre de son appréciation concrète, les conséquences de sa constatation selon laquelle, conformément à la législation applicable, un médicament dont la mise sur le marché n’a pas encore été autorisée ne peut même pas faire l’objet d’une publicité destinée à obtenir ou à préserver une part de marché. Il est, partant, impossible d’utiliser une marque désignant un tel médicament sur le marché concerné, contrairement à ce qu’exige la jurisprudence citée au point 39 du présent arrêt.

48      Il importe d’ajouter que la circonstance, à la supposer établie, que les actes d’usage invoqués par V…..  étaient, comme cette dernière le fait valoir, conformes aux prescriptions légales applicables ne saurait suffire à établir la nature sérieuse, au sens de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, de cet usage, dès lors que celle-ci s’apprécie, de manière concrète, au vu de l’ensemble des faits et des circonstances propres à l’espèce concernée et ne saurait dépendre exclusivement de la nature légale des actes d’usage. Or, en l’occurrence, il ne s’agissait pas d’un usage sur le marché des produits protégés par la marque contestée.

49      Dans la mesure où V……  tire argument de la prétendue insuffisance, pour le secteur pharmaceutique, du délai de cinq ans visé à l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, il convient de faire observer, comme M. l’avocat général l’a relevé au point 45 de ses conclusions, que ce délai s’applique indépendamment du secteur économique dont relèvent les produits ou les services pour lesquels la marque en cause est enregistrée. Partant, cet argument est inopérant.

50      En second lieu, en réponse à certains arguments de V….. , le Tribunal a relevé, au point 39 de l’arrêt attaqué visé au point 45 du présent arrêt, que l’utilisation de la marque contestée dans le cadre d’un essai clinique ne pouvait être assimilée à une mise sur le marché ni même à un acte préparatoire direct, mais devait être considérée comme étant de nature interne, car elle s’était déroulée hors de la concurrence, au sein d’un cercle restreint d’intervenants, et sans viser à obtenir ou à conserver des parts de marché.

Une mise sur le marché imminente aurait pu néanmoins constituer un usage sérieux

51      Ce faisant, le Tribunal n’a pas méconnu la jurisprudence citée au point 39 du présent arrêt et invoquée par V….. , selon laquelle il peut y avoir usage sérieux d’une marque de l’Union européenne quand les produits désignés ne sont pas encore commercialisés. Au contraire, le Tribunal a rappelé à bon droit, au point 37 de l’arrêt attaqué, qu’un tel usage ne peut être constaté qu’à condition que la commercialisation des produits en cause soit imminente et a jugé, aux points 38 et 39 de cet arrêt, que V….  n’avait pas apporté la preuve que tel était le cas en l’espèce.

52      En particulier, en examinant si l’usage allégué de la marque contestée était effectué à l’égard de tiers et si le volume d’usage était suffisamment important au regard des contingences propres au secteur pharmaceutique, le Tribunal a examiné, conformément à la jurisprudence de la Cour, le caractère sérieux de cet usage.

53      En effet, eu égard à la jurisprudence citée aux points 38 à 41 du présent arrêt et ainsi que l’a, en substance, relevé M. l’avocat général aux points 57, 59 et 61 à 63 de ses conclusions, il y a lieu de considérer que, dans la mesure où l’usage sérieux d’une marque de l’Union européenne ne peut être établi par des actes d’usage afférents à un stade antérieur à la commercialisation des produits ou des services désignés que pour autant que la commercialisation est imminente, les actes d’usage susceptibles d’établir un tel usage sérieux doivent avoir un caractère externe et produire des effets pour le futur public de ces produits ou services, et ce même dans une telle phase antérieure à la commercialisation.

L’argument textuel sur la forme modifiée ne peut pas s’appliquer aux études cliniques

54      Enfin, contrairement à ce que fait valoir V…., il ne saurait être déduit de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement no 207/2009 une interprétation plus souple de la notion d’« usage sérieux ».

55      En effet, en vertu de cette dernière disposition, l’usage de la marque sous une forme qui diffère de la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée est considéré comme étant un usage, au sens de l’article 15, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 207/2009, pour autant que le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée n’est pas altéré. …

56      Ainsi, en n’exigeant pas une stricte conformité entre la forme utilisée dans le commerce et celle sous laquelle la marque a été enregistrée, l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement no 207/2009 vise à permettre au titulaire de cette dernière d’apporter au signe, à l’occasion de son exploitation commerciale, les variations qui, sans en modifier le caractère distinctif, permettent de mieux l’adapter aux exigences de commercialisation et de promotion des produits ou des services concernés……

57      Si l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement no 207/2009 instaure ainsi une certaine souplesse quant à la forme de l’usage d’une marque de l’Union européenne, il n’en demeure pas moins que cette disposition reste dépourvue de toute incidence sur l’appréciation du caractère sérieux de cet usage, laquelle doit être effectuée conformément aux critères établis par la jurisprudence rappelée aux points 38 à 41 du présent arrêt.

58      Il s’ensuit que le premier moyen doit être écarté comme étant, en partie, inopérant et, en partie, non fondé.

Le pourvoi contre l’arrêt du Tribunal qui avait rejeté une demande en annulation d’une décision de l’office ayant prononcé la déchéance de la marque est rejetée

Tant que le Brexit n’est pas intervenu, les britanniques bénéficient pleinement du système de la marque de l’Union

Le 29 novembre 2018, la Cour de justice a refusé tout effet par anticipation au Brexit, et cet arrêt est intervenu en matière de marque.
Très brièvement la chronologie à l’arrêt du 29 novembre 2018, l’arrêt est là

28 janvier 2010 : enregistrement de la marque de l’Union  ALCOLOCK pour des produits et services des classes 9, 37 et 42.

13 août 2012 : Lion Laboratorie, société britannique,  demande la nullité de cet enregistrement en invoquant la marque verbale antérieure ALCOLOCK, enregistrée au Royaume-Uni depuis le 16 août 1996 pour désigner « [a]ppareils pour tester, mesurer, indiquer, enregistrer et/ou analyser l’alcool dans l’air expiré ; appareils de contrôle des appareils précités ou réagissant aux appareils précités ; pièces et parties constitutives de ces appareils », de la classe 9.

22 novembre 2012 : Alcohol Countermeasure Systems, société canadienne, le titulaire de la marque de l’union,  demande des preuves d’usages de la marque britannique .

24 mars 2014 : la division d’annulation annule la marque de l’union. L’usage de la marque britannique étant retenu comme sérieux.

11 août 2015 : rejet par la Chambre de recours de l’EUIPO du recours présenté par le titulaire de la marque de l’Union.

29 mars 2017 : rejet du recours par le Tribunal de l’Union.

29 novembre 2018 : la Cour de Justice de l’Union rejette le pourvoi contre l’arrêt du Tribunal.

Parmi les différents moyens présentés à la Cour, l’examen du 5ème retient plus particulièrement l’attention. Pour la société titulaire de la marque de l’Union, la marque antérieure étant une marque britannique, le Tribunal aurait dû reporter sa décision après le 29 mars 2019, date de la sortie de l’Union.

La Cour refuse cette analyse.

Tant que le Brexit n’est pas intervenu, le Royaume-Uni et ses ressortissants bénéficient pleinement des droits de l’Union

108    En substance, elle [ la requérante, le titulaire de la marque de l’Union] estime que, à compter du 23 juin 2016, date du référendum à l’occasion duquel le peuple du Royaume-Uni a exprimé sa volonté de se retirer de l’Union, le Tribunal aurait dû, au nom de l’ordre public, tenir compte du futur retrait du Royaume-Uni de l’Union ou ordonner une suspension de la procédure jusqu’au retrait effectif de celui-ci, afin d’annuler, ensuite, la décision litigieuse. Elle observe que le Tribunal a prononcé l’arrêt attaqué le jour où le Royaume-Uni a notifié son intention de se retirer de l’Union, conformément à l’article 50 TUE.

109    Ce faisant, le gouvernement du Royaume-Uni aurait reconnu que les marques du Royaume-Uni ne sauraient servir de fondement aux fins de l’annulation de marques de l’Union européenne.

110    La requérante ajoute, d’une part, que le fait que la décision litigieuse a été adoptée avant ladite notification et que le droit de l’Union continue à s’appliquer au Royaume-Uni pendant le déroulement de la procédure visée à l’article 50 TUE ne saurait s’opposer à la recevabilité ainsi qu’au bien-fondé du présent moyen. En effet, ce moyen soulèverait des questions d’ordre public. De surcroît, la requérante n’aurait pu avancer ledit moyen devant le Tribunal, dès lors que le référendum a été organisé après la clôture, le 11 février 2016, de la procédure écrite devant celui-ci.

111    D’autre part, la requérante estime qu’il ne lui suffirait pas de déposer une nouvelle marque de l’Union européenne portant sur le signe « alcolock » au terme de la procédure visée à l’article 50 TUE. En effet, elle ne serait plus en mesure de réclamer, à ce moment-là, le plein bénéfice de ses droits d’ancienneté. De surcroît, la transformation de la marque contestée en marques nationales, en attendant le retrait du Royaume-Uni de l’Union, l’exposerait à des coûts inutiles et disproportionnés.

112    La requérante fait par ailleurs observer que, compte tenu de l’article 64, paragraphe 3, du règlement no 207/2009, c’est la date à laquelle sera rendu l’arrêt de la Cour sur pourvoi qui importe.

113    L’EUIPO estime que ce moyen est dénué de tout fondement.

114    Le Royaume-Uni estime que le présent moyen est irrecevable et, en tout état de cause, non fondé.

 Appréciation de la Cour

115    Par son cinquième moyen, la requérante allègue, en substance, que le Tribunal aurait dû suspendre la procédure jusqu’à la date du retrait du Royaume-Uni de l’Union, afin de pouvoir annuler la décision litigieuse au motif qu’une marque antérieure du Royaume-Uni ne pourrait plus être opposée au maintien d’une marque de l’Union européenne.

116    Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité d’un tel moyen, il convient de relever que, aux termes de l’article 65, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision d’une chambre de recours de l’EUIPO que « pour incompétence, violation des formes substantielles, violation du traité, [dudit] règlement ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir ». Il s’ensuit que le Tribunal ne peut annuler ou réformer la décision litigieuse que si, à la date à laquelle cette décision a été prise, elle était entachée d’un motif d’annulation ou de réformation. En revanche, le Tribunal ne saurait annuler ou réformer ladite décision pour des motifs qui apparaîtraient postérieurement à son prononcé

117    Or, il serait contraire à cette jurisprudence de considérer que le Tribunal était en l’espèce tenu de suspendre la procédure pendante devant lui afin, le cas échéant, d’annuler la décision litigieuse à la suite du retrait du Royaume-Uni de l’Union au motif, par ailleurs purement hypothétique à ce stade, que ledit retrait affecterait rétroactivement l’issue des procédures en nullité fondées sur une marque antérieure de cet État membre.

118    Par ailleurs, dans la mesure où la requérante soutient que Lion Laboratories est désormais une société établie en dehors de l’Union et que cette société a obtenu l’annulation de la marque contestée sur la base de la marque antérieure enregistrée hors de l’Union, il convient de relever que la seule notification par un État membre de son intention de se retirer de l’Union conformément à l’article 50 TUE n’a pas pour effet de suspendre l’application du droit de l’Union dans cet État membre et que, par conséquent, ce droit reste pleinement en vigueur dans ledit État membre jusqu’à son retrait effectif de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 19 septembre 2018, RO, C‑327/18 PPU, EU:C:2018:733, point 45).

119    Il s’ensuit que le cinquième moyen et, par conséquent, le quatrième chef des conclusions de la requérante doivent être écartés.

120    Aucun des moyens soulevés par la requérante à l’appui de son pourvoi n’ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter ce pourvoi dans son intégralité.

Autrement dit tant que le Brexit n’est pas intervenu, les ressortissants du Royaume-Uni bénéficient pleinement des droits de l’Union y compris des règles applicables aux marques de l’Union

 

Une marque verbale enregistrée comme marque sonore

Différents signes sont susceptibles de constituer une marque enregistrée.

Classiquement, la principale limite à cette diversité était posée par l’exigence de représentation graphique.

Aujourd’hui, certains offices de propriété industrielle admettent des signes pour lesquels cette exigence est abandonnée .

Par exemple, l’EUIPO a enregistré une marque sonore :

Son enregistrement est ici

Plus récemment, le 13 août 2018,  est déposé à titre de marque,  le son :

Les produits et services visés à son enregistrement sont

Une différence essentielle toutefois entre ces deux enregistrements. La première marque porte sur un signe qui facilement pouvait être déposé comme marque verbale (à moins que la volonté de son titulaire ait été de revendiquer d’autres caractéristiques comme le timbre de cette voix).

Une marque de couleur n’est pas exclue de la protection par l’ article 3 de la directive

L’arrêt du 12 juin 2018 de la Cour de Justice est à saluer pour les titulaires de marque.

Lors d’un litige au Pays-Bas en contrefaçon de  marque, la juridiction saisit la Cour de justice d’une question préjudicielle relative  à l’article 3, paragraphe 1, sous e), iii), de la directive 2008/95 qui exclut de la protection à titre de marque, le signe portant exclusivement sur la forme du produit.

La marque en cause porte sur le signe :rouge sur la semelle Pour : « Chaussures à talons hauts (à l’exception des chaussures orthopédiques) ».

L’arrêt de la Cour est très clair pour reconnaître que cette marque n’entre pas dans l’exclusion de l’article 3 de la directive 2008/95.

21      Dans le contexte du droit des marques, la notion de « forme » s’entend généralement, ainsi que l’a souligné la Commission européenne, comme désignant un ensemble de lignes ou de contours qui délimite le produit concerné dans l’espace.

22      Il ne ressort ni de la directive 2008/95, ni de la jurisprudence de la Cour, ni du sens usuel de ce terme qu’une couleur en elle-même, sans délimitation dans l’espace, pourrait constituer une forme.

23      La question se pose toutefois de savoir si le fait qu’une couleur déterminée soit appliquée à un emplacement spécifique du produit concerné signifie que le signe en cause est constitué par une forme, au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous e), iii), de la directive 2008/95.

24      À cet égard, il convient de relever que, si, certes, la forme du produit ou d’une partie du produit joue un rôle dans la délimitation de la couleur dans l’espace, il ne saurait toutefois être considéré qu’un signe est constitué par cette forme lorsque ce n’est pas celle-ci que l’enregistrement de la marque vise à protéger, mais seulement l’application d’une couleur à un emplacement spécifique dudit produit.

25      Ainsi que l’ont relevé les gouvernements allemand, français et du Royaume-Uni, ainsi que la Commission, la marque litigieuse ne porte pas sur une forme spécifique de semelle de chaussures à talons hauts, la description de cette marque indiquant expressément que le contour de la chaussure ne fait pas partie de ladite marque, mais sert uniquement à mettre en évidence l’emplacement de la couleur rouge visée par l’enregistrement.

26      En tout état de cause, un signe, tel que celui en cause au principal, ne saurait être considéré comme étant constitué « exclusivement » par la forme, lorsque, comme en l’occurrence, l’objet principal de ce signe est une couleur précisée au moyen d’un code d’identification internationalement reconnu.

27      Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 3, paragraphe 1, sous e), iii), de la directive 2008/95 doit être interprété en ce sens qu’un signe consistant en une couleur appliquée sur la semelle d’une chaussure à talon haut, tel que celui en cause au principal, n’est pas constitué exclusivement par la « forme », au sens de cette disposition.

Ce que juge la Cour :

L’article 3, paragraphe 1, sous e), iii), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques, doit être interprété en ce sens qu’un signe consistant en une couleur appliquée sur la semelle d’une chaussure à talon haut, tel que celui en cause au principal, n’est pas constitué exclusivement par la « forme », au sens de cette disposition.

Qui ne connaît pas la signification des signes « ° », « ’ » et « ’’ » dans l’expression « 23°48’25’’S »?

Qui ne connaît pas la signification des signes  « ° », « ’ » et « ’’ »  dans l’expression « 23°48’25’’S »

La réponse est donnée à l’arrêt du Tribunal du 8 juin 2017 où sont en conflit les signes « Southern Territory 23°48’25’’S »  et «SOUTHERN »

En revanche, il importe de constater, à l’instar de la chambre de recours (point 26 de la décision attaquée), que les chiffres mentionnés à la fin de la marque contestée ne présentent pas de lien entre eux et que le public pertinent, lequel ne dispose pas nécessairement de connaissances suffisamment spécialisées en géographie, pourra ne pas reconnaître ce que signifient les éléments « ° », « ’ » et « ’’ ». Il pourra également lui être difficile de comprendre la lettre « s » finale comme étant une référence à l’hémisphère sud du globe terrestre. Partant, ces éléments revêtent un rôle plus secondaire dans la perception d’ensemble des signes en conflit, car, comme l’a indiqué la chambre de recours à juste titre, au point 27 de la décision attaquée, le public pertinent ne procède pas à des réflexions géographiques complexes lors de l’achat des produits concernés.

Le public pertinent est celui qui achète des « Vêtements, chaussures, chapellerie »;

L’arrêt est là.

Comment l’EUIPO doit-il suivre ses précédentes décisions

Un arrêt du 9 septembre du Tribunal s’est prononcé sur la référence par l’EUIPO à ses précédentes décisions, cette affaire intervenait sur une marque dont la renommée avait déjà été reconnue par l’EUIPO. C’est

A l’arrêt du Tribunal du  11 octobre 2016, il est question également de marques figuratives.

Dans cette seconde affaire,  le Tribunal rejette le recours de l’opposant, qui soutenait également que la décision de la Chambre de recours manquait de cohérence avec la pratique antérieure.

La demande de marque contestée :marque-deposeeQuelques-unes des marques antérieures opposées :

marque-anterieure-1

et marque-anterieure-2-capture

et

marque-anterieure-3

La motivation du rejet du recours sur cette question de la cohérence avec les décisions antérieures.

1      La requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas motivé son appréciation selon laquelle le fait que l’élément « g » puisse être perçu comme une lettre dans les signes en conflit n’entraînerait aucune similitude entre ces derniers, de sorte qu’elle ne serait pas en mesure de comprendre les raisons pour lesquelles son recours a été rejeté. Par ailleurs, elle soutient que la décision attaquée ne présente pas de cohérence avec la pratique décisionnelle antérieure de l’EUIPO, ce qui rendrait encore plus difficile la compréhension des motifs de ladite décision.

42      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

……..

44      Toutefois, les chambres de recours ne sont pas obligées, dans la motivation des décisions qu’elles sont amenées à prendre, de prendre position sur tous les arguments que les intéressés invoquent devant elles. Il suffit qu’elles exposent les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision ……

………..

46      Quant à la prétendue absence de cohérence entre la décision attaquée et les décisions antérieures des divisions d’annulation et d’opposition de l’EUIPO invoquées par la requérante, dans lesquelles une importance accrue aurait été accordée à l’élément « g » commun aux signes en cause, à supposer qu’un tel grief puisse relever d’une violation de l’obligation de motivation, il y a lieu d’observer que les chambres de recours ne sauraient être liées par les décisions d’instances inférieures de l’EUIPO ………………….Au demeurant, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que les décisions que les chambres de recours de l’EUIPO sont amenées à prendre, en vertu du règlement n° 207/2009, concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque de l’Union européenne, relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité desdites décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci .

47      En outre, la jurisprudence confirme que, si, au regard des principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’EUIPO doit prendre en considération les décisions déjà adoptées et s’interroger avec une attention particulière sur la question de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit toutefois être conciliée avec le respect du principe de légalité….

 

La marque de l’Union européenne en principe unitaire, mais un principe à tempérer par des exceptions

Le caractère unitaire de la marque de l’Union européenne connait un tempérament comme le rappelle la Cour de Justice dans son arrêt du 22 septembre 2016.

Invoquant sa marque européenne et sa marque allemande pour des produits et des services de l’informatique, une société allemande engage une action en contrefaçon en Allemagne à l’encontre d’une société israélienne qui commercialise via son site internet et notamment vers l’Allemagne des logiciels, pour voir cesser ces agissements.

 Le Landgericht de Düsseldorf accepte la demande d’interdiction en Allemagne sur la base de la marque allemande mais rejette la demande d’interdiction dans l’Union sur la base de la marque européenne.

Appel devant l’Oberlandesgericht de Düsseldorf, qui sur la demande au regard de la marque européenne :

« conclut à l’existence d’un risque de confusion dans les États membres germanophones et à l’absence d’un tel risque dans les États membres anglophones ».

et l’Oberlandesgericht de Düsseldorf interroge la Cour de justice , sur l’application du caractère unitaire de la marque de l’Union européenne dans un tel cas.

L’arrêt du 22 septembre 2016 de la Cour de Justice :

L’article 1er, paragraphe 2, l’article 9, paragraphe 1, sous b), et l’article 102, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’un tribunal des marques de l’Union européenne constate que l’usage d’un signe crée un risque de confusion avec une marque de l’Union européenne dans une partie du territoire de l’Union européenne, tout en ne créant pas un tel risque dans une autre partie de ce territoire, ce tribunal doit conclure qu’il y a violation du droit exclusif conféré par cette marque et prononcer un ordre de cessation dudit usage pour l’ensemble du territoire de l’Union européenne, à l’exception de la partie de celle-ci pour laquelle l’absence d’un risque de confusion a été constatée.

 

Revolution n’est pas une marque valable

Le signe « Revolution » a fait l’objet d’une demande de marque communautaire pour désigner  « Consultation en matière financière ; mise à disposition de capital-risque, capital-développement, capital-investissement et financements d’investissement ; gestion de fonds de capital-investissement ».

L’examinateur de l’OHMI ( devenu EUIPO depuis)  puis la Chambre  de recours de l’office  rejettent cette demande  d’enregistrement.

Sur recours du déposant que le Tribunal rejette par son arrêt du 2 juin 2016, le terme Revolution ne peut pas constituer une marque valable pour les produits désignés à la demande d’enregistrement.

28      En effet, une des significations du terme « revolution » est bien celle d’un changement fondamental, drastique et de grande envergure, ce qui n’est pas contesté par la requérante. Utilisé à l’égard des services financiers visés par la marque demandée, ce terme véhicule pour le public pertinent un message selon lequel ceux-ci sont de nouveaux types de services proposant des solutions d’investissement nouvelles, innovantes ou différentes de celles existant jusqu’alors, et qui modifient en conséquence l’offre de ces services dans le sens où ces services financiers révolutionnaires permettraient de meilleurs retours sur investissement. En effet, ainsi que la chambre de recours l’a mis en évidence au point 23 de la décision attaquée, les services d’investissement visés en l’espèce, et plus particulièrement la mise à disposition de capital-risque, capital-développement, capital-investissement et financements d’investissement et la gestion de fonds de capital-investissement, sont souvent liés aux marchés émergents ou sont fondés sur des produits financiers innovants grâce auxquels l’investisseur peut espérer maximiser ses investissements.

29      Dès lors, le terme « revolution » possède un caractère laudatif de nature publicitaire dont la fonction est de mettre en relief les qualités positives des services concernés. En effet, il est immédiatement perçu par le public pertinent comme un message élogieux à caractère promotionnel, qui indique que les services visés par le signe demandé présentent, pour le public pertinent, un changement positif et des avantages par rapport aux services précédemment proposés ou proposés par les concurrents.

L’arrêt est .

Demande de marque communautaire, la renommée reconnue dans un Etat ne vaut pas pour l’Union.

Un arrêt du 18 mars 2016 du Tribunal rappelle que se référer à une précédente décision de ce même tribunal n’est pas la voie de la facilité. L’arrêt est .

La marque communautaire demandée porte sur le signe verbal BIMBO.

Sa demande d’enregistrement vise « Farines, pain et préparations et produits à base de céréales ; produits de pâtisserie et de biscuiterie ».

Successivement, l’examinateur et la Chambre de recours refusent cette demande d’enregistrement. Le refus est fondé sur l’idée que selon un dictionnaire italien, le mot « bimbo » n’était ni affectueux ni familier, mais était le synonyme de « bambino », soit « enfant » en italien, ce qui pouvait laisser croire à la destination des produits ;

Le recours devant le Tribunal est rejeté.

Parmi les arguments examinés, l’acquisition du caractère distinctif de la marque. A cette fin la déposante invoque :
– « document n° 12 : arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 14 décembre 2012 dans l’affaire T 357/11, GRUPO BIMBO, dans lequel le Tribunal reconnaît la renommée de la marque BIMBO en Espagne ;

Voyons ce qu’en dit l’arrêt du 18 mars 2016 :

82 Quatrièmement, s’agissant du document n° 12, soit l’arrêt du 14 décembre 2012, Bimbo/OHMI – Grupo Bimbo (GRUPO BIMBO) (T 357/11, EU:T:2012:696), il convient d’écarter comme étant dépourvu de tout fondement l’argument de la requérante selon lequel le fait que soit apportée la preuve de la renommée de la marque demandée en Espagne, notamment par sa reconnaissance dans ledit arrêt, suffirait pour établir le caractère distinctif de cette marque pour l’ensemble de l’Union.

Analyse éclairée quelques lignes plus loin :

89 Il appartenait donc à la requérante de faire la preuve de l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage dans la partie de l’Union dans laquelle la marque demandée était ab initio dépourvue de tout caractère distinctif, soit, en l’occurrence, en Italie. Or, force est de constater que la requérante n’a pas démontré que la marque demandée avait acquis un caractère distinctif en raison de l’usage qu’elle en avait fait en Italie.