Procédure d’enregistrement d’une marque communautaire : conflit entre deux marques verbales dont la seconde reprend le terme de la marque première

Le dépôt de la marque contestée

10 août 2004 dépôt de la marque communautaire par les Parfums Givenchy SA pour désigner : « Savons de toilette ; parfums ; eaux de Cologne et de toilette ; produits cosmétiques ; maquillage ; huiles essentielles à usage personnel ; laits, lotions, crèmes, émulsions, gels pour le visage et pour le corps ; déodorants à usage personnel ».

Opposition de la société Aktieselskabet fondée sur différents droits antérieurs :

–        la marque danoise verbale ONLY , déposée le 28 juin 2001 et enregistrée le 10 août 2001 sous la référence VR 200103359, désignant, notamment, les produits relevant des classes 3 et 9 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 3 : « Savons ; parfumerie, huiles essentielles, cosmétiques, lotions pour les cheveux ; dentifrices » ;

–        classe 9 : « Lunettes, montures de lunettes, lunettes anti-éblouissantes, lunettes de soleil » ;

–        la marque danoise verbale ONLY, déposée le 28 avril 1995 et enregistrée le 17 mai 2000 sous la référence VR 200002183, désignant les produits relevant de la classe 25 et correspondant à des « vêtements et chaussures » ;

–        la marque communautaire verbale ONLY, déposée le 25 septembre 1997 et enregistrée le 7 janvier 2000 sous le numéro 638833, désignant les produits relevant des classes 14, 18 et 25 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 14 : « Instruments d’horlogerie » ;

–        classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; peaux d’animaux, malles et valises ; parapluies, parasols et cannes ; fouets et sellerie » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures et chapellerie ».

Rejet de l’opposition :

  • les produits en cause sont différents,
  • même si la renommée des marques danoise et communautaire antérieures au Danemark est établie, la société danoise ne montre pas que l’usage de la marque déposée « tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des marques antérieures ou qu’il leur porterait préjudice. »

Recours devant l’OHMI et nouveau rejet :

  • le territoire pertinent est le Danemark
  • le consommateur pertinent est le était le consommateur moyen, censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.
  • si « les signes étaient similaires à un faible degré sur le plan visuel, car l’adverbe « only » avait pour but d’attirer l’attention sur l’élément « givenchy » dans la marque demandée, alors que l’adverbe « only » était un concept général dans les marques antérieures.
  • Sur le plan phonétique, la chambre de recours a considéré, au point 25 de la décision attaquée, que les signes étaient similaires à un degré moyen du fait de la prononciation de l’élément supplémentaire « givenchy » dans la marque demandée.
  • Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a estimé, au point 29 de la décision attaquée, que l’élément « only givenchy » créait une unité logique et conceptuelle avec une valeur sémantique élogieuse, distincte du mot « only » considéré isolément, en sorte que les signes étaient partiellement similaires.

Partant, la chambre de recours a conclu, au point 30 de la décision attaquée, qu’il n’existait aucun risque de confusion entre les signes en conflit, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Ce résultat s’imposait également, ainsi qu’il ressort du point 31 de la décision attaquée, s’agissant des marques danoise et communautaire antérieures VR 200002183 et n° 638833, dans la mesure où ces dernières étaient identiques à la marque danoise antérieure VR 200103359, mais les produits visés par ces marques et ceux visés par la marque demandée étaient tout au plus similaires.

  • Enfin, en ce qui concerne l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, la chambre de recours a considéré, au point 36 de la décision attaquée, que le degré de similitude entre les signes en conflit n’était pas suffisant pour que le public effectue un rapprochement entre eux, dès lors que l’élément « only » compris dans la marque demandée serait considéré indissociablement avec l’élément « givenchy », alors qu’il avait un rôle distinctif indépendant dans les marques antérieures. Par conséquent, la condition relative à la similitude des signes amenant le public pertinent à établir un lien entre les signes n’étant pas remplie, la chambre de recours a, au point 37 de la décision attaquée, rejeté le moyen fondé sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

Arrêt du TPICE du 8 décembre 2011 :

On se limitera ici à l’analyse de l’approche conceptuelle qui confirmera la décision de l’OHMI :

  • « …… il convient de relever que les concepts que suggèrent ou que véhiculent les termes « only » et « only givenchy » sont différents. En effet, la combinaison de l’élément « only », aisément compris du public visé comme un adverbe ou un adjectif (un, seul, exclusivement, uniquement), et de l’élément « givenchy », dépourvu pour ledit public de toute signification, amènera ledit public à déceler l’expression laudative dans son ensemble et le caractère exclusif du produit concerné, l’élément « only » apportant une spécificité à l’élément « givenchy ». La combinaison de ces deux éléments crée ainsi un concept et une unité logique distincte de ceux de ses composants »

 

  • « ……. il ne saurait être considéré que l’élément « givenchy » serait perçu comme désignant une filiale ou un détenteur de licence produisant des biens sous la marque ONLY, dès lors que, ainsi qu’il a été constaté, la combinaison des éléments « only » et « givenchy » constitue une unité conceptuelle dans laquelle « only » est un qualificatif élogieux de « givenchy »