Deux marques communautaires BE HAPPY annulées

Deux marques communautaires BE HAPPY viennent d’être annulées par le Tribunal le 30 avril 2015. L’arrêt est ici.

24 août 2006 : demande d’enregistrement de marque communautaire à l’OHMI du signe verbal BE HAPPY.

Pour

–        classe 16 : « Papier, carton, articles pour reliures » ;

–        classe 21 : « Verres et récipients pour le ménage et la cuisine (ni en métaux précieux, ni en plaqué) ; verrerie, porcelaine et faïence (comprises dans la classe 21) » ;

–        classe 28 : « Jeux ; jouets » ;

–        classe 30 : « Confiserie ».

25 octobre 2007 ; enregistrement de la marque communautaire

5 novembre 2009 : seconde demande d’enregistrement de marque communautaire pour le signe verbal BE HAPPY

Pour

–        classe 9 : « Appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son ou des images ; ordinateurs, logiciels ; lunettes, étuis à lunettes » ;

–        classe 11 : « Appareils de cuisson électriques, machines à café (électriques) » ;

–        classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; malles et valises ; sacs, sacs de voyage, sacs à main, porte-monnaie, sacs à dos ; parapluies et parasols ».

30 avril 2010 : enregistrement de cette seconde marque communautaire

30 janvier 2012 : un tiers engage une procédure d’annulation devant l’OHMI pour ces deux marques

30 octobre 2012 : la division d’annulation annule les marques contestées au motif qu’elles ne présentaient pas de caractère distinctif.

28 décembre 2012 : recours du titulaire des deux marques

17 octobre 2013 : la Chambre de recours rejette les deux recours

L’affaire vient devant le Tribunal qui va rejeter également les recours du titulaire de ces deux marques communautaires BE HAPPY

  • Un message objectif

30      Il résulte des décisions attaquées que les marques contestées sont composées de deux termes anglais du langage courant, à savoir « be » et « happy », qui se présentent de manière conforme aux règles de la syntaxe et de la grammaire anglaise. De ce fait, la combinaison de ces termes constitue une expression qui a une signification précise au regard du public pertinent, à savoir « sois heureux ». Cette expression est largement connue dudit public du fait de son utilisation dans une chanson populaire comme celle intitulée « Don’t worry, be happy » (points 18 et 19 de la première décision, ainsi que points 17 et 18 de la seconde décision). Ces considérations ne sont pas contestées par la requérante.

31      Il ressort de ce qui précède que, contrairement à ce que prétend la requérante, les marques contestées expriment un message objectif, invitant à être heureux.

  • Un tel message ne constitue pas une marque

……, les marques contestées seront immédiatement comprises par le public pertinent, sans qu’il soit nécessaire pour celui-ci de développer un minimum d’effort interprétatif ou de déclencher un processus cognitif, comme une expression incitant à l’achat et portant sur le sentiment de bonheur que soit l’achat, soit l’utilisation des produits en cause sont susceptibles d’éveiller dans l’esprit des consommateurs. En outre, comme il a été indiqué au point 30 ci-dessus, lesdites marques sont composées de deux mots communs de la langue anglaise, qui se présentent de manière conforme aux règles de la syntaxe et de la grammaire anglaise et dont la combinaison donne lieu à l’élément verbal « be happy » qui signifie « sois heureux » et qui correspond également au titre d’une chanson bien connue. Ainsi, elles sont dépourvues de toute originalité ou prégnance, conformément à la jurisprudence rappelée au point 39 ci-dessus.

41      En outre, il résulte des décisions attaquées que l’expression en cause serait susceptible d’être utilisée par n’importe quel fournisseur afin d’inciter à l’achat de n’importe quels produits, y compris ceux visés par les marques

42      Par ailleurs, il convient de tenir compte du fait que, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur des slogans tels que celui en cause en l’espèce

43      Dès lors, il y a lieu de considérer que les marques contestées ne sauraient être perçues par le public pertinent comme des indications d’origine commerciale.

 

Communiqué de presse de l’INPI à relayer

Le communiqué de presse de l’INPI du 13 janvier doit être largement approuvé. C’est ici

Demandes de marques « Je suis Charlie »

Depuis le 7 janvier, l’INPI a reçu de nombreuses demandes de marques « Je suis Charlie », ou faisant référence à ce slogan.

L’INPI a pris la décision de ne pas enregistrer ces demandes de marques, car elles ne répondent pas au critère de caractère distinctif.

En effet, ce slogan ne peut pas être capté par un acteur économique du fait de sa large utilisation par la collectivité.

Cette annonce de l’INPI est à rapprocher de l’arrêt que la Cour de cassation vient de rendre, le 6 janvier 2015, à propos de différentes marques « I Paris  » comprises non comme des signes distinctifs d’une entreprise déterminée mas comme des messages d’attachement.

Par cet arrêt, la Cour de cassation rejette le pourvoi contre l’arrêt de la Cour de Paris qui avait annulé ces marques.

Mais attendu, en premier lieu, qu’il résulte tant de l’article 1er de la loi du 31 décembre 1964 que des articles L. 711-1 et L. 711-2 du code de la propriété intellectuelle que la marque est un signe servant à distinguer des produits ou services et que le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés et par rapport à la perception qu’en a le public auquel cette marque est destinée ; qu’après avoir rappelé que, pour être distinctif, un signe, même s’il n’est ni nécessaire, ni générique, ni usuel, ni descriptif, doit conduire le public pertinent à penser que les produits ou services en cause proviennent d’une entreprise déterminée, l’arrêt, tant par motifs propres qu’adoptés, relève, d’abord, que seuls sont concernés les produits visés dans l’enregistrement des marques et « listés » par la société Paris Wear Diffusion, qui, vendus dans le cadre de son activité, ressortissent au commerce touristique, et en déduit que le public pertinent est constitué des touristes d’attention moyenne en quête de l’achat de souvenirs afin de conserver une trace de leur passage à Paris ; qu’il relève, ensuite, que le contenu sémantique des deux signes complexes litigieux appréhendés dans leur ensemble, en ce qu’il véhicule un message d’attachement à une ville particulière, conduira le consommateur à les percevoir comme des signes décoratifs dont il comprendra le sens, quelle que soit sa langue, et non pas comme des marques lui garantissant que les produits sur lesquels ils sont apposés sont fabriqués et commercialisés par la société France Trading, licenciée de M. X…, quand bien même seraient-ils apposés sur des étiquettes ; que par ces constatations et appréciations faisant ressortir que la fonction d’identification d’origine des marques n’était pas remplie pour les produits en cause et rendant inopérants les griefs des deuxième et sixième branches et abstraction faite du motif surabondant critiqué par les première et cinquième branches, la cour d’appel, qui n’a pas inversé la charge de la preuve, a légalement justifié sa décision ;