Une action en déchéance ne nuit-elle jamais au titulaire de la marque ?

L’action en déchéance de marque devant l’Inpi n’est pas soumise à la condition d’intérêt à agir.

Pourtant la décision de l’INPI du  10 septembre 2021 déclare irrecevable une telle demande en la qualifiant d’abus de droit.

Le dernier n° du PIBD ( 1178-III-6) résume ainsi cette décision :

Le contrat de franchise prévoyait un droit exclusif d’utiliser la marque contestée par la présente demande en déchéance qui avait été accordé au franchisé (le demandeur) pour la durée du contrat. Ce dernier n’a jamais été contesté par le demandeur qui a lui-même exploité la marque litigieuse. Il a introduit sa demande en déchéance à la suite d’un jugement du tribunal de commerce de Paris l’ayant condamné pour fautes constitutives de manquements graves au contrat de franchise. Cela démontre sa volonté de tirer un avantage indu de sa demande en déchéance, à savoir nuire au titulaire de la marque contestée. L’intention malveillante du demandeur se traduit également par l’existence d’une procédure devant le conseil de Prud’hommes à l’encontre du titulaire de la marque contestée. L’ensemble de ces actions permettant de caractériser un abus du droit d’agir du demandeur. 

Marque : l’annonce de nouvelles procédures devant l’INPI avec le recours administratif préalable obligatoire

L’INPI envisage de nouvelles procédures et interroge sur leur mise en oeuvre par un questionnaire accessible en ligne dont les réponses sont attendues pour le 31 août. Le questionnaire de l’INPI

Des recours en RAPO

Trait commun à ces nouvelles procédures, elles prendront la forme d’un RAPO .

Cette nouvelle procédure prendrait la forme d’un RAPO (recours administratif préalable obligatoire)  et permettrait de renforcer la transparence, la prévisibilité et la cohésion des décisions de l’Institut.

Des besoins de RAPO maintenant ……et pas avant ?

L’INPI expose le besoin de ces nouvelles procédures :

L’INPI émet chaque année plusieurs centaines de milliers de décisions procédurales en rapport avec l’enregistrement, la délivrance ou le maintien des titres de propriété industrielle,  parmi lesquelles un nombre significatif (plusieurs dizaines de milliers) de décisions susceptibles de faire grief, car prononçant un refus (rejet, irrecevabilité…).

Dès lors qu’un déposant souhaite contester une telle décision, il doit saisir les tribunaux. La validité des décisions du directeur de l’INPI est en effet soumise au contrôle des cours d’appel de l’ordre judiciaire, initiant ainsi un processus long et coûteux.

Si le  recours administratif préalable obligatoire (RAPO) existe en droit administratif depuis longtemps, le questionnaire de L’INPI n’explique pas pourquoi :

  •  celui-ci n’a pas été mis en oeuvre précédemment,
  •  et quels événements justifient son introduction pour les droits de propriété industrielle,
  •  et que soient concernées toutes les décisions de l’INPI sans distinguer  celles qui s’appliquent au seul déposant ou au titulaire de la marque de celles où plusieurs parties s’opposent (opposition de marque, demande en nullité ou en déchéance de marque ).

Toutes les demandes des usagers de l’INPI soumises au RAPO ?

A se reporter au questionnaire, de très nombreuses demandes présentées par les usagers à l’INPI et relatives aux marques si ce n’est toutes, seraient concernées :

  • les décisions statuant sur l’examen des marques,
  • les décisions statuant sur une opposition de marque,
  • les décisions statuant sur une demande d’annulation (nullité ou déchéance) de marque.

L’application par l’INPI du  recours administratif préalable obligatoire (RAPO) modifierait l’effet dévolutif du recours devant la Cour d’appel en matière de nullité et de déchéance de marque, qui a été introduit récemment à la suite de l’exclusivité accordée à l’INPI pour les demandes en nullité et en déchéance de marques qui a débuté en avril 2020.

Cette importance réforme impactera directement les usagers, et leurs avocats.

Ne pas confondre RAPO et recours devant une chambre de recours

Des différents aspects que cette réforme présente, une distinction essentielle doit être soulignée, le RAPO ne conduit pas à la mise en place de chambres de recours analogues à celles de l’EUIPO, voir notre  article .

 

Actions en nullité et en déchéance de marque : l’efficacité de l’INPI

Chacun se souvient que des différentes modifications législatives apportées aux marques, celle qui fut la plus commentée par les professionnels créait devant l’INPI des procédures en nullité et en déchéance de marque assorties d’une exclusivité en faveur de l’office.

Au 1er avril 2020 sont entrées en vigueur ces deux nouvelles procédures administratives ( Elles sont amplement présentées ici ).

30 décisions ont été rendues et publiées depuis.  Premières impressions.

Comme pour répondre aux interrogations des professionnels, la première décision intervient sur une action en déchéance de marque dont le demandeur fait l’objet d’une action en contrefaçon engagée antérieurement devant un tribunal par le titulaire de cette même marque. Le 10 juillet 2020, l’INPI déclare irrecevable cette demande. Primauté de l’instance judiciaire donc, puisque devant le tribunal antérieurement saisi, la demande en déchéance aurait dû être présentée.

Autre motif d’irrecevabilité d’une demande en nullité reconnu par deux décisions de l’Office,  la marque contestée n’est pas encore enregistrée.

Mais ce ne sont là finalement que des péripéties par rapport à l’enseignement essentiel de ces 30 premières décisions de l’INPI.

Leur rapidité. Pour la plus grande partie d’entre elles, ces décisions sont rendues dans un délai compris entre 5 et 7 mois, ce qui est un succès au regard des durées accordées au titulaire de la marque pour se manifester.  Avec la pandémie tenir de tels délais constituer une prouesse.

Exceptée dans une seule affaire, le titulaire de la marque n’a pas apporté d’argumentaire pour combattre la demande en nullité ou en déchéance. Et toutes les demandes en nullité ou en déchéance examinées, sont acceptées dans leur totalité ou partiellement.

Autrement dit,  ces procédures administratives montrent leur utilité pour faire disparaître les marques qui ne sont pas exploitées ou dont les titulaires ne voient plus d’intérêt à leur maintien.

Antérieurement à la création de ces procédures administratives, obtenir les mêmes résultats pour les demandeurs aurait nécessité de leur part l’engagement de procédures judiciaires et les aurait exposés à des délais beaucoup plus longs et à des frais bien supérieurs.

Seule ombre à ce tableau, le faible nombre de ces actions. En 2020, par mois, elles se comptaient très rarement au-dessus de 10.

 

 

 

Combien d’actions en déchéance et en nullité devant l’INPI : le succès ?

Depuis le 1er avril, il est possible d’engager des procédures en nullité et en déchéance de marque devant l’INPI.

Ces deux procédures administratives ont-elles rencontré un succès ou au moins suscité un intérêt ?

Premiers résultats :

Les actions en déchéance doublent le nombre des actions en nullité.

  • Six actions en déchéance totale
  •  Deux actions en nullité partielle
  •  Une action en déchéance partielle
  •  Une action en nullité totale

Élément essentiel à noter :  ces actions sont celles enregistrées par l’INPI au 10 avril.

Pandémie : procédures en déchéance et en nullité devant l’Inpi quand les tribunaux suspendent leurs activités en propriété industrielle

Aujourd’hui 2 avril, l’annonce faite hier sur le site de l’INPI est toujours en ligne :

Le portail e-procédures de l’INPI a été mis à jour pour permettre de réaliser deux nouvelles démarches, entrées en vigueur avec la loi PACTE à compter du 1er avril 2020 : les demandes en nullité ou en déchéance de marque ainsi que les oppositions à l’encontre d’un brevet, contestations qui étaient jusqu’à présent uniquement possibles en justice.

La nouvelle procédure administrative en nullité ou en déchéance de marque permet de faciliter la suppression de marques en cas de défaut de validité ou d’existence d’une marque ou d’un autre droit antérieur et de rendre disponibles des marques non exploitées pour que d’autres acteurs économiques puissent les utiliser.

…une procédure écrite exclusivement électronique, accessible via le portail e-procédures de l’INPI

Des nombreux débats qui ont accueilli ces nouvelles procédures administratives, une question restait en suspens : leur succès, c’est-à-dire combien de procédures seraient engagées devant l’Office.

La pandémie  a changé la donne puisque les tribunaux de grande instance tribunaux judiciaires ont  drastiquement ralenti leurs activités en se concentrant sur les affaires pénales et en privilégiant les urgences civiles essentiellement pour les affaires familiales. Cette situation impacte également la délivrance des assignations. Sans action en contrefaçon pas de demande reconventionnelle en nullité ou en déchéance de marque. L’INPI se trouve seul en charge de ces contentieux.

L’avenir nous dira si le covid-19 a contribué au succès de ces procédures administratives en nullité et en déchéance de marque.