Preuve de l’usage de la marque, une analyse des documents qui remontent à plus de 10 ans

L’arrêt de la CJCE du 18 janvier 2011, T 382/08, invite l’OHMI à examiner document par document les pièces invoquées par l’opposant au dépôt de la marque communautaire

Disons- le tout de suite, les preuves d’usage seront jugées insuffisantes par la Cour qui annulera la décision de l’Office.

Notons aussi que la demande de marque remonte au …..1er avril 1996, les péripéties et autres recours qui se sont accumulés depuis justifieraient à eux seuls un long article…Cette demande n’aurait donc pas encore été enregistrée qu’elle aurait dû être renouvelée.

Limitons-nous à la question des preuves d’usage de la marque qui était opposée, et qui se rapportaient à son emploi pour désigner des chaussures.

La Cour rappelle la règle de droit :

« En vertu de la règle 22, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95, tel que modifié, la preuve de l’usage doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure. »

Puis l’interprétation de cette règle :

« Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque …. De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle que protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur »

La période sur laquelle l’opposant devait fournir ses preuves : du 13 septembre 1994 au 12 septembre 1999, car autre source d’étonnement la publication de cette demande de 1996 n’est intervenue que le 13 septembre 1999.

Différentes preuves étaient produites : des déclarations provenant de quinze fabricants de chaussures, une déclaration du « managing partner » de l’opposante datée du 12 septembre 2001, des copies de quelque 670 factures adressées à l’opposante par des fabricants de chaussures, 35 photographies de modèles de chaussures portant la marque VOGUE, 12 semelles intérieures de chaussures portant la marque VOGUE, des photographies de magasins portant le nom commercial VOGUE, des copies de répertoires téléphoniques couvrant la période 1999-2000, mentionnant deux magasins situés à Porto (Portugal) avec indication de l’expression « sapataria vogue ».

A propos des attestations.

« il y a lieu de relever que ni les déclarations des quinze fabricants de chaussures ni celle du « managing partner » ne font mention d’indications relatives à l’importance de l’usage. Dans ces conditions, ces déclarations ne sauraient constituer, à elles seules, une preuve suffisante de l’usage sérieux de la marque antérieure. »

Pour les photographies des chaussures :

« Des photographies de modèles de chaussures portant la marque VOGUE et des semelles de chaussures portant la marque VOGUE. Même si ces éléments peuvent avoir pour effet de corroborer la « nature » (chaussures) de l’usage de la marque antérieure, ils n’apportent en revanche aucun élément permettant de corroborer le lieu, la durée ou l’importance de l’usage »,

Quant aux photographies de magasins de chaussures portant le nom VOGUE et des copies de répertoires téléphoniques couvrant la période 1999-2000, lesquelles mentionnent deux magasins situés à Porto avec indication de l’expression « sapataria vogue »:

« ces éléments ne corroborent ni la nature, ni la durée, ni l’importance, ni même le lieu de l’usage de la marque. En effet, il ne résulte d’aucun de ces éléments avancés par l’opposante en vue de prouver l’usage sérieux de la marque antérieure que lesdits magasins commercialisaient des chaussures portant la marque antérieure. Les photographies de magasins portant le nom VOGUE ne font pas apparaître que les chaussures exposées en vitrine sont des chaussures portant la marque antérieure ».

Avec ses factures, l’opposant saura-t-il convaincre la Cour ?

« Quant aux copies des quelque 670 factures adressées à l’opposante par des fabricants de chaussures et couvrant l’ensemble de la période pertinente, il y a lieu de constater, comme l’a relevé la division d’opposition, qu’aucune d’entre elles ne fait mention de chaussures de marque VOGUE et qu’elles sont dès lors impuissantes à prouver que l’opposante vendait effectivement des chaussures portant la marque antérieure. Lorsque le mot « vogue » apparaît sur lesdites factures, il est généralement accolé au nom de l’opposante pour désigner le nom commercial VOGUE-SAPATARIA. »

Et à propos de ces factures, la Cour précise encore :

« à supposer même que les quelque 670 factures adressées à l’opposante par les fabricants de chaussures concernent des chaussures portant la marque VOGUE, force est de constater que lesdites factures sont relatives à la vente de chaussures à l’opposante, non à la vente, aux consommateurs finaux, de chaussures portant la marque VOGUE.

Marque France ou Made in France ?

Qu’entendons-nous par la marque France ?

Une question écrite posée par M. Jean- Claude Guibal, député, et la réponse qui lui a été donnée apportent des débuts de réponses.

La question M. Jean-Claude Guibal attire l’attention de M. le ministre chargé de l’Industrie sur la nécessité de créer une marque France. Ainsi, selon une étude réalisée par Viavoice, 64 % des Français pensent que leur pays est de moins en moins performant et attendent que les entreprises véhiculent une meilleure image de la France. Il ne s’agirait pas seulement de valoriser les produits et services vendus. Il s’agirait plutôt de présenter les atouts des entreprises françaises pour l’économie et la société : croissance, emploi, innovation. Parmi les pistes évoquées, figure la « renaissance » de la marque France, pour que le consommateur puisse savoir si un produit est fabriqué en France ou ailleurs, notamment par une identification visuelle. Ainsi il apparaît que le concept de marque doit être fédérateur et non plus dilué dans les différentes appellations (NF, Fabriqué en France, République française ou Rendez-vous en France). En conséquence, il lui demande si le Gouvernement, à l’issue des états généraux de l’Industrie, entend créer cette marque France.

Réponse. La protection et la valorisation du made in France sont une préoccupation majeure du Gouvernement. M. Yves Jego, député de Seine-et-Marne, a été chargé d’une mission de réflexion sur l’évolution du label made in France par le président de la République.

L’enjeu est triple :

– renseigner les consommateurs sur l’origine française des produits,

– en faire un argument de vente,

– et mettre en valeur les entreprises qui ont fait des choix vertueux en matière sociale ou environnementale.

Il a remis son rapport au Président le 6 mai 2010. Ses recommandations s’articulent autour de dix propositions et notamment la clarification de la définition et du contrôle du made in France et l’introduction d’un système de classement à étoiles, l’obligation de marquage d’origine au niveau communautaire pour l’ensemble des produits mis sur le marché, la mise en place d’un label d’origine, sur une base volontaire, porteur des valeurs du made in France et notamment la transparence vis-à-vis du consommateur, la mise en place d’une carte d’identité des produits. Dans le prolongement de ce rapport, une mission administrative spécifique, chargée de préparer les mesures nécessaires à la mise en oeuvre des propositions du rapport, a été mise en place par le ministre chargé de l’Industrie, en lien avec M. Jego. Les travaux se dérouleront d’ici la fin de l’année 2010 avec l’appui des services du ministère de l’Économie, de l’Industrie et de l’Emploi. Elle étudiera,notamment, les évolutions législatives ou réglementaires nécessaires pour assurer les textes sur la transparence et la traçabilité et agira auprès de la Commission européenne en faveur de la révision de la réglementation européenne sur le marquage d’origine, en lien avec l’ambassadeur de l’industrie et en concertation avec les professions ; les réflexions qui nécessitent une approche par filière pourront être traitées au sein des comités stratégiques de filières qui seront tous installés d’ici la fin 2010, à la suite des états généraux de l’industrie.

Si le régime de la marque devait s’appliquer, faudrait-il songer à celui des marques collectives, ou plus particulièrement à celui des marques collectives de certifications ?