Les marques sur Internet et les noms de domaine, jurisprudence, contrefaçon et autres atteintes aux marques un blog de Philippe Schmitt avocat propriété intellectuelle
L’arrêt rendu par le TPICE le 23 novembre 2010 souligne, une fois encore, la complexité de l’appréciation du risque pour le nouveau déposant au regard d’une marque antérieure.
Le dépôt contesté
Sur la similitude visuelle :
La comparaison visuelle entre les signes en conflit doit être effectuée sur la base de l’ensemble de leurs différents éléments constitutifs, figuratifs et verbaux. ….Les signes en conflit présentent d’importantes différences concernant la forme, la taille et la couleur de leurs éléments
Sur la similitude phonétique :
L’expression « artesa napa valley » de la marque demandée produit une impression phonétique différente de celle produite par le mot « arteso ».
Mais le Tribunal va disqualifier cette expression pour l’appréciation de ce risque :
Le public pertinent anglophone percevra plutôt cet élément comme une indication de l’origine géographique des produits en question, et non comme un élément distinctif de la marque demandée. »
C’est sur ce motif que le Tribunal rejettera le recours contre la décision de l’OHMI qui avait refusé l’enregistrement du dépôt.
La marque antérieure
Toutefois, pour refuser de donner une signification particulière au dépôt, le Tribunal s’en explique plus particulièrement à propos de l’expression « napa valley » :
il y a lieu de considérer que l’expression « napa valley » n’est pas suffisante afin d’éviter que le public puisse croire que les produits en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Certes, ainsi qu’il a été relevé au point 49 ci-dessus, l’expression en cause sera perçue comme une indication de l’origine géographique des produits en cause par une partie significative du public pertinent, mais sans que ce dernier attribue au signe un contenu conceptuel particulier.
Mais finalement ces distinctions sont-elles bien nécessaires au regard des pratiques des consommateurs ?
Oui, puisqu’après avoir décomposé les différents risques de similitudes, la démarche méthodologique, le Tribunal apprécie globalement les signes en cause en les pondérant par un élément factuel : le comportement particulier du consommateur pour commander des vins :
« Dans le secteur des vins, ……….les consommateurs de ces produits sont habitués à les désigner et à les reconnaître en fonction de l’élément verbal qui sert à les identifier, en particulier dans les bars ou les restaurants, dans lesquels les vins sont commandés oralement après avoir vu leur nom sur la carte. Dès lors, en l’espèce, il convient d’attacher une importance particulière à la similitude phonétique entre les signes en cause.
Les questions particulièrement délicates de transbordement et de réexpédition des marchandises au regard des droits de propriété industrielle viennent régulièrement devant les Tribunaux. Une nouvelle illustration en est donnée par le jugement du 4 juin 2010.
Des marchandises dont l’expéditeur est une société asiatique et le destinataire situé dans un pays à l’époque extérieur à l’Union Européenne sont « temporairement stockées en zone aéroportuaire dans l’attente de leur réexpédition ».
Une société nord-américaine alertée par les douanes françaises et titulaire de différentes marques communautaires engage une action en contrefaçon de marque devant le Tribunal de Grande Instance de Paris, qui est déboutée par jugement du 4 juin 2010 au motif qu’elle ne démontre pas « une mise sur le marché ou un risque de mise sur le marché français » des marchandises.
Google se situe au 4ème rang du classement Interbrand derrière Coca-Cola, IBM et Microsoft.
Ce classement 2010 qui repose à la fois sur des performances financières et sur l’impact de la marque auprès des consommateurs, est expliqué par la confiance qu’a réussi à instaurer Google avec son moteur de recherche et ses autres activités sur Internet malgré quelques déboires sur ………les données personnelles des internautes.
« it increasingly finds it difficult to reconcile its brand promise, “Don’t be evil,” with the realities of a powerful global brand. »
L’arrêt du 12 novembre 2010 du Tribunal a confirmé le refus de l’OHMI d’enregistrer la marque de couleur dont la description est « Le gris clair (RAL 7035) est situé au-dessus du rouge signalisation (RAL 3020), lui-même situé au-dessus du gris clair (RAL 7035) ; du haut vers le bas, le rapport des couleurs entre elles est tel que gris clair : rouge signalisation : gris clair = 7 : 1 : 2. », ce qui visuellement donne ceci :
Son enregistrement avait été demandé pour » « Transport de personnes et de marchandises par voie ferrée ».
Cette demande de marque visait donc des services, ce qui est l’intérêt de cette décision.
Or, pour ceux-ci, le Tribunal relève :
Le gris clair est communément utilisé sur les équipements techniques nécessaires pour la fourniture de services de transport ferroviaire, telles, par exemple, les parties de locomotives ou de wagons et les armoires de commande le long de voies ferrée….
La couleur rouge signalisation est quant à elle utilisée en tant que couleur d’avertissement pour les panneaux de signalisation et en tant que couleur permettant de capter l’attention du consommateur dans les messages publicitaires.
Non seulement ces couleurs prises individuellement n’ont pas de caractère distinctif, et ensemble elles en sont également dépourvues :
le gris clair peut être perçu comme du blanc sale. La combinaison de couleurs en cause est donc très proche de la combinaison de blanc et de rouge signalisation qui est utilisée sur les barrières ferroviaires et les panneaux routiers concernant les chemins de fer
les lignes longitudinales de couleur sont communément utilisées comme éléments de décoration sur les trains.
Les bandes longitudinales rouges peuvent également signaler l’espace entre un wagon et le quai de la gare.
Et de conclure pour confirmer le rejet de la demande d’enregistrement :
Le signe sera perçu par le public pertinent comme un élément fonctionnel ou décoratif et non comme une indication de l’origine commerciale des services en cause.
En novembre, l’Union des Fabricants (UNIFAB), le Syndicat de la presse quotidienne nationale (SPQN), et le Syndicat de la Presse Magazine (SPM) se sont adressés au dirigeant de Google.
« En prenant l’initiative de lancer pendant l’été un service qui permet à quiconque d’acheter des marques, en tant que mots-clefs, pour déclencher ses liens commerciaux, Google a franchi une étape. En effet, ce changement est source de développement de situations illégales – actes de parasitisme, de concurrence déloyale ou de contrefaçon, risque de confusion pour le consommateur en recherche de références fiables… – face auxquelles Google ne peut rester sans réponse.
Dans ce contexte, l’UDA, l’UNIFAB, le SPQN et le SPM appellent Google, compte tenu de sa place dans le référencement numérique, à se comporter comme un partenaire
économique loyal et responsable, respectueux des droits de propriété intellectuelle de ses clients et soucieux de prévenir tout impact négatif lié à son activité.
C’est pourquoi, au nom de l’ensemble des entreprises qu’elles représentent, elles
demandent à nouveau à Google que sa politique de liens commerciaux prenne en compte la protection effective des marques et offre aux entreprises dans les plus brefs délais des solutions concrètes ».