Acquisition du caractère distinctif de la marque par l’usage, la Cour de Justice refuse de fixer un taux de réponses satisfaisantes par un sondage

Le caractère distinctif d’un signe employé comme marque peut être acquis par l’usage, mais comment établir L’acquisition d’un tel pouvoir ? La Cour de justice rend un arrêt important le 19 juin 2014. L’arrêt est ici.

  • Y -a-t-il un seuil de réponses favorables à fixer aux sondages pour établir l’acquisition du caractère distinctif de la marque ?

48      ………… il ne saurait être indiqué, de façon générale, par exemple en recourant à des pourcentages déterminés relatifs au degré de reconnaissance de la marque dans les milieux concernés, quand une marque a acquis un caractère distinctif par l’usage et que, même pour les marques de couleur sans contours, telles que celle en cause au principal, et même si un sondage d’opinion peut faire partie des éléments permettant d’apprécier si une telle marque a acquis un caractère distinctif par l’usage, le résultat d’un tel sondage d’opinion ne saurait constituer le seul élément déterminant permettant de conclure à l’existence d’un caractère distinctif acquis par l’usage.

49      Eu égard à ces considérations, il convient de répondre à la première question que l’article 3, paragraphes 1 et 3, de la directive 2008/95 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une interprétation du droit national selon laquelle, dans des procédures soulevant la question de savoir si une marque de couleur sans contours a acquis un caractère distinctif par l’usage, il est dans tous les cas nécessaire qu’un sondage d’opinion donne pour résultat un degré de reconnaissance de cette marque d’au moins 70 %.

  • Cet arrêt rappelle également un point essentiel du droit des marques : l’acquisition du caractère distinctif doit intervenir avant le dépôt de la marque

61      Il découle de ces considérations qu’il convient de répondre à la deuxième question que, lorsqu’un État membre n’a pas fait usage de la faculté prévue à l’article 3, paragraphe 3, seconde phrase, de la directive 2008/95, l’article 3, paragraphe 3, première phrase, de cette directive doit être interprété en ce sens que, dans le cadre d’une procédure de nullité visant une marque dépourvue de caractère distinctif intrinsèque, il convient, afin d’apprécier si cette marque a acquis un caractère distinctif par l’usage, d’examiner si un tel caractère a été acquis avant la date du dépôt de la demande d’enregistrement de cette marque. Il est sans incidence à cet égard que le titulaire de la marque contestée fasse valoir que cette dernière a, en tout état de cause, acquis un caractère distinctif par l’usage après le dépôt de la demande d’enregistrement, mais avant son enregistrement.

  • Et corollaire à ce principe

68      Eu égard à cet objectif ainsi qu’à la structure et à l’économie de l’article 3, paragraphe 3, de la directive 2008/95, il convient de constater que, dans le cadre d’une procédure de nullité, la charge de la preuve du caractère distinctif acquis par l’usage de la marque contestée doit incomber au titulaire de cette marque, qui invoque ce caractère distinctif.

 

 

Contrefaçon de marque : intervention des douanes et information du procureur de la République

Les douanes disposent de pouvoirs spécifiques pour intervenir en cas de contrefaçon de marque.Parmi les règles qui organisent l’intervention des douanes, l’information du Procureur de la République.

L’arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation du 30 octobre 2013 intervient à propos de la preuve de cette information du Procureur de la République, l’arrêt est ici .

  • Le 30 octobre 2013, la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel de Colmar qui avait annulé la procédure :

aux motifs que l’attestation a posteriori de M. Y… qui atteste avoir adressé au procureur de la République une télécopie l’informant de la visite envisagée par l’administration des douanes dans le cadre de l’article 63 ter du code des douanes ne saurait suppléer l’absence de production du rapport d’émission ou de réception de ladite télécopie de telle sorte qu’en l’absence de toute trace objectivement vérifiable justifiant l’accomplissement de l’information du procureur de la République, conformément au texte susmentionné, il convient de retenir que cette diligence n’a pas été accomplie et d’annuler par voie de conséquence le procès-verbal n° 1 des douanes, s’agissant d’une formalité substantielle dont l’omission porte grief à la prévenue privée de ce fait du contrôle du parquet également garant des libertés individuelles ; qu’il y a lieu, par voie de conséquence, d’annuler tous les actes subséquents au procès-verbal n° 1 de l’administration des douanes, c’est à dire, l’ensemble des actes de la procédure, et de renvoyer la prévenue des fins de la poursuite ; que, dès lors, le jugement entrepris doit être confirmé ;

  • Motif de la cassation

Vu les articles 63 ter du code des douanes et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que, d’une part, le premier de ces textes, qui impose aux agents des douanes d’informer préalablement le procureur de la République des opérations de visite de locaux à usage professionnel, ne soumet pas cette obligation à un formalisme particulier ;

Attendu que, d’autre part, selon l’article 593 du même code, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu’à la suite d’une visite des locaux professionnels dont Mme X… est la propriétaire, révélant la présence de marchandises présentées sous une marque contrefaisante, les agents des douanes ont dressé un procès-verbal de constatation, en date du 28 janvier 2009, mentionnant que le procureur de la République avait été préalablement informé de cette opération et ne s’y était pas opposé ;

Attendu que, pour accueillir l’exception de nullité soulevée par la prévenue, tirée de la méconnaissance des dispositions de l’article 63 ter précité et annuler l’ensemble de la procédure, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen;

Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors que la preuve de l’information préalable du procureur de la République résultait des mentions du procès-verbal de visite et de l’attestation de l’agent ayant procédé à cette information, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;

Titularité des droits d’auteur et exploitation antérieure, l’arrêt de la Cour de cassation du 4 mai

La titularité des droits d’auteur offre l’occasion à de nombreux débats judiciaires, l’arrêt rendu le 4 mai par la Cour de cassation précise cette problématique au regard d’une exploitation antérieure.

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X… déclare avoir créé des modèles de sandales qu’il a fait fabriquer en Thaïlande et qu’il commercialise en France avec la SARL La Marine, dans des braderies et sur les marchés ; qu’ayant constaté le 23 juin 2004, que des modèles de sandales reprenant, selon lui, les caractéristiques de ses modèles étaient offerts à la vente, lors de la braderie de Rennes, sur le stand tenu par Mme Y…et M. Z…, il a fait assigner ces derniers en contrefaçon de ses droits d’auteur et en concurrence déloyale, que la SARL La Marine est intervenue volontairement à l’instance ;

Sur le second moyen :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt d’avoir débouté M. X… et la société La Marine de leur action en concurrence déloyale, alors, selon le moyen, qu’est constitutive d’une telle concurrence la commercialisation d’un produit sous une présentation de nature à générer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine des produits ; qu’en se bornant à relever que le nom commercial  » La Tresse  » ne prêterait pas à confusion avec la dénomination  » La Marine « , sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si ce terme ne rappelait pas le slogan utilisé par M. X… depuis nombreuses années, et si la reprise de cet élément de communication pour commercialiser des copies serviles des produits exploités par M. X… et la société La Marine n’était pas de nature à entraîner un risque de confusion dans l’esprit du public, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil ;

Mais attendu que la cour d’appel qui a procédé à un examen précis des conditions dans lesquelles les sandales étaient présentées sur le stand tenu par la société La Marine et sur celui tenu par Mme Y…et M. Z…, et qui a pris en considération les dénominations utilisées par les parties pour accompagner la vente de leurs produits, a souverainement estimé que la clientèle n’était pas exposée à un risque de confusion ; qu’elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l’article L. 113-5 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que l’exploitation non équivoque d’une oeuvre par une personne physique ou morale sous son nom et en l’absence de revendication du ou des auteurs, fait présumer à l’égard du tiers recherché pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l’oeuvre du droit de propriété incorporelle ;

Attendu que pour débouter M. X… de son action en contrefaçon, l’arrêt constate que celui-ci n’apportait aucun élément de nature à justifier de sa qualité d’auteur et retient qu’il n’était pas présumé titulaire des droits d’exploitation des modèles en cause qui avaient été vendus par des tiers à La Réunion et sur le marché de Chatuchak à Bangkok, avant qu’il ne commençât à les commercialiser ;

Qu’en statuant ainsi alors qu’il résultait de ses propres constatations, que M. X… justifiait d’actes non équivoques d’exploitation en France métropolitaine depuis juin 2001, la cour d’appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il a rejeté les demandes formées au titre de la concurrence déloyale, l’arrêt rendu le 2 décembre 2010, entre les parties, par la cour d’appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Angers ;

Condamne M. Z…et Mme Y…aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Conflit entre une demande de marque communutaire ARANTAX et une marque nationale : des preuves de l’usage de la marque nationale antérieure par 6 factures pour 2 277 Euros

L’arrêt du Tribunal du 2 février 2012, T‑387/10, Klaus G., contre Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), est singulier par les services en cause et par les preuves de l’usage de la marque antérieure qui ont été reconnues suffisantes.

Les marques

22 décembre 2005 : dépôt de la demande de marque communautaire par M. Klaus G….. : le signe verbal ARANTAX

–      classe 35 : « Services d’un conseiller fiscal, établissement de déclarations fiscales, tenue des livres comptables, commissariat aux comptes, services de conseils en affaires » ;

–      classe 36 : « Établissement d’expertises et d’évaluations fiscales, fusions et acquisitions, à savoir conseils financiers lors de l’achat ou de la vente d’entreprises ainsi que de prises de participations dans des entreprises, gestion de fortune » ;

–      classe 42 : « Services juridiques, recherche juridique ».

16 août 2006 : opposition fondée sur la marque  allemande verbale antérieure ANTAX, déposée le 22 décembre 1999

–  « commissariat aux comptes, conseils en matière d’organisation, conseils professionnels, conseils en ressources humaines, conseils d’entreprises ; services d’un conseiller fiscal ; publication de bulletins d’information et d’informations des consommateurs sous forme d’imprimés ; tenue de cours de formation continue, formation dans les domaines de l’expertise comptable et du conseil fiscal, organisation de séminaires ; services d’un avocat, conseil fiscal, conceptions de programmes pour ordinateurs ».

Les décisions de l’OHMI

25 novembre 2008 : rejet de l’opposition par la division d’opposition, celle-ci considère que les preuve de l’usage de la marque antérieure sont insuffisantes

1er juillet 2010 : la quatrième chambre de recours de l’OHMI accepte l’opposition à l’exception des services de  « gestion de fortune ». La chambre a donc jugé suffisantes les preuves d’usages pour les autres services de la marque antérieure.

Le déposant saisit le Tribunal.

La décision du Tribunal: le recours est rejeté.

  • Les éléments de preuve jugés comme suffisants

Les éléments de preuve de l’usage de la marque antérieure :

–        six factures d’honoraires des années 2004 à 2007 pour un montant total de 2 277,09 euros ;

–      des extraits du registre du commerce de sociétés de conseils fiscaux ayant ANTAX comme dénomination sociale, ainsi que des répertoires et des extraits de leurs pages d’accueil Internet ;

–      une déclaration du gérant de la société de l’intervenante, Karl‑Heinz Siebenpfeiffer, qualifiée de « déclaration de témoin ».

Le Tribunal consacre de longs développements à ces 6 factures pour confirmer l’acceptation par la chambre de recours de l’OHMI de ces factures comme des preuves de l’usage de la marque antérieure pour des services de conseil fiscal :

Il convient d’abord de constater que seules six factures ont été produites devant la division d’opposition pour la période pertinente de cinq ans visée à l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, laquelle s’étend du 3 juillet 2001 au 2 juillet 2006.

32 Les factures produites par l’intervenante concernent les activités suivantes : comptabilité des salaires ; détermination des bénéfices imposables à partir de la détermination des recettes et excédents ; établissement de la déclaration d’impôt sur le revenu ; calcul de la déclaration annuelle relative à la taxe sur le chiffre d’affaires ; contrôle de l’avis d’imposition ; calcul des revenus du capital ; calcul des revenus locatifs.

33 Or, il résulte de l’article 1er du Steuerberatungsgesetz (loi allemande sur le conseil fiscal) que cette loi a un champ d’application très large, puisqu’elle s’applique aux services d’assistance pour la gestion des livres comptables ainsi que pour l’établissement des bilans ayant de l’importance en matière d’imposition. L’article 33 de cette loi attribue aux conseillers fiscaux la mission, notamment, de fournir à leurs clients de l’aide en matière de fiscalité et d’accomplissement de leurs obligations fiscales et comptables. Ces services d’assistance visent en particulier l’établissement du bilan fiscal et son appréciation au regard du droit fiscal.

34 Par ailleurs, comme le souligne l’intervenante, les services mentionnés dans les factures produites sont des services correspondant à ceux visés dans la Steuerberatergebührenverordnung (règlement allemand sur les tarifs des conseillers fiscaux). Ainsi, l’article 34, paragraphe 2, de ce règlement vise la comptabilité courante des salaires. L’intervenante relève encore, à juste titre, que la page Internet de la Bundessteuerberaterkammer (chambre fédérale des conseillers fiscaux) mentionne les activités d’un conseiller fiscal et cite, notamment, la tenue des livres comptables, la comptabilité des salaires, l’établissement de déclarations fiscales et les services de conseils en affaires.

35 Il convient donc de constater que, contrairement à ce que soutient le requérant, les factures produites concernent bien des activités susceptibles d’être proposées par un conseiller fiscal allemand.

36 Concernant les arguments du requérant selon lesquels, d’une part, le faible montant des factures ne permettrait pas de prouver un usage sérieux de la marque antérieure et, d’autre part, les noms et adresses des clients étant masqués sur lesdites factures, il ne peut être exclu que les services n’aient été accomplis que dans un espace limité au niveau local, ni qu’ils aient été accomplis pour des sociétés ou des personnes liées, il y a d’abord lieu de rappeler que, quand bien même la marque antérieure ne serait pas présente sur une partie substantielle du territoire allemand, sur lequel elle est protégée, l’importance territoriale de l’usage n’est qu’un des facteurs devant être pris en compte, parmi d’autres, pour déterminer s’il est sérieux ou non (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié au Recueil, point 46).

37 De plus, outre ces factures provenant de sociétés basées à Düsseldorf et à Regensburg, les extraits, produits par l’intervenante devant la division d’opposition, de registres du commerce de sociétés ayant la marque ANTAX comme dénomination sociale, immatriculées à Metzingen, à Heidelberg, à Ueckermünde, à Leipzig, à Hannovre, à Nuremberg, et à Cologne démontrent une utilisation de ce signe qui n’est pas seulement locale. Il en est de même en ce qui concerne les répertoires indiquant les adresses de ces sociétés.

38 Le témoignage de son gérant produit par l’intervenante, selon lequel certaines de ces sociétés, de même que celle établie à Regensburg, sont actives et s’occupent « d’une large clientèle » (grossen Mandantenstamm), est un élément supplémentaire venant corroborer la diffusion géographique et l’utilisation de cette marque.

39 Par ailleurs, il résulte notamment des indications telles que « nous sommes conseillers fiscaux pour les professions de santé » (Wir sind Steuerberater für Gesundheitsberufe), « conseils et guide […] pour médecins – dentistes – pharmaciens – soins » (Tipps & Wissenswertes für […] Ärtze – Zahnärzte – Apotheker – Pflege) et « ANTAX – votre spécialiste pour les professions de santé » (ANTAX – Ihr Spezialist für Heilberufe), figurant sur plusieurs pages d’accueil Internet de sociétés fiscales ayant ANTAX comme dénomination sociale, produites par l’intervenante devant la division d’opposition, que la marque  antérieure est utilisée publiquement et vers l’extérieur.

40 À cet égard, cette dernière indication, et, surtout, l’indication « ANTAX Steuerberatungsgesellschaft » (ANTAX Société de conseil fiscal) sur toutes ces pages d’accueil Internet démontre clairement l’utilisation de la marque ANTAX de telle façon qu’il s’établit un lien entre cette marque constituant la dénomination sociale et les services fournis au sens de la jurisprudence (voir point 26 ci‑dessus).

41 Au surplus, il convient de constater que l’argument du requérant visant à établir le défaut d’usage de la marque antérieure, selon lequel la dénomination antax n’aurait aucun lien avec les services fournis, est en contradiction avec son argument visant à démontrer l’absence de similitude entre les signes ANTAX et ARANTAX, selon lequel, quant à leur comparaison conceptuelle, le public pertinent comprendra la syllabe finale « tax » dans son acception anglaise (impôt), notion avec laquelle les services proposés par la marque  allemande antérieure ANTAX présenteraient un lien (voir point 74 ci-dessous).

42 Ainsi, et dès lors qu’il n’existe pas de règle de minimis pour établir la preuve de l’usage sérieux et qu’un usage limité peut être compatible avec une présence réelle sur le marché ( arrêt de la Cour du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, Rec. p. I‑4237, point 65), en tenant compte des factures, des extraits du registre du commerce, du témoignage du gérant, des extraits des pages d’accueil Internet et des répertoires, il convient de considérer que l’intervenante a apporté la preuve suffisante de l’importance de l’usage de la marque antérieure pour les « services d’un conseiller fiscal ».

 

Indemnisation des préjudices pour des actes de contrefaçon, comment effectuer le calcul des dommages et intérêts en cas d’expertise infructeuse : les dommages et intérêts forfaitaires et le rôle de l’avocat

Sur quelle base calculer les dommages et intérêts ? Cette question si elle se pose naturellement au juge dans l’instance en contrefaçon quand après avoir retenu  l’existence des actes de contrefaçon ,  il doit en fixer l’indemnisation pour le titulaire des droits, interpelle la partie poursuivie en contrefaçon à la réception de l’assignation. Le titulaire des droits, lui aussi,  a sans doute interrogé son avocat avant d’engager la procédure. A cette question, l’avocat, on le voit,  est interrogé à de multiples occasions mais il n’a pas, le plus souvent,  les éléments financiers pour y répondre de manière précise.

 

Un arrêt intéressant a été rendu le 4 janvier 2012 par la Cour de Paris. Cet arrêt est intervenu en matière de contrefaçon de dessins protégés par les dispositions du Code sur la propriété littéraire et artistique.

  • Un jugement du Tribunal de Grande Instance de Bobigny condamne une société pour des actes de contrefaçon de dessins. Le tribunal ordonne une expertise.
  • Lors de l’expertise, selon l’arrêt, la société condamnée ne fournit pas à l’expert tous les documents que celui-ci a demandés.
  • Le Tribunal retenant que « que la société défenderesse n’avait pas communiqué à ce dernier les éléments objectifs probants nécessaires à l’accomplissement de sa mission et » a « procédé en conséquence à une évaluation forfaitaire du préjudice de M. X…, fixée à 25. 000 euros ».

La société fait appel de ce jugement.

L’arrêt du 4 janvier ne porte que sur l’appel de la condamnation financière, « cette société faisant valoir, en synthèse, que la preuve n’est rapportée d’aucune exploitation commerciale des produits contrefaisants » ;

Le problème posé : en l’absence de coopération de la partie condamnée pour produire les documents demandés lors de l’expertise, comment fixer les dommages et intérêts ?

La solution : le montant forfaitaire

La Cour de Paris rappelle des dispositions du Code qui autorisent le caractère forfaitaire des dommages et intérêts. L’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle dispose : « pour fixer les dommages intérêts, la juridiction prend en considération les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subis par la partie lésée, les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte au droit et le préjudice moral causé au titulaire de ces droits du fait de l’atteinte.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire qui ne peut être inférieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. » ;

La Cour procède en trois étapes :

  • La Cour vérifie que la société condamnée n’a fait aucune diligence sérieuse lors de l’expertise : « Considérant que le tribunal, ayant notamment relevé dans les motifs de son jugement que ni les factures d’achat ni les factures de vente communiquées à l’expert par la société ……ne comportaient une référence quelconque, en a exactement déduit qu’elle n’avait fait aucune diligence sérieuse pour contribuer à la mesure d’instruction et permettre à l’expert d’évaluer la masse contrefaisante ;
  • La Cour retient que le Tribunal a appliqué le montant forfaitaire demandé par le titulaire des droits : « une évaluation forfaitaire du préjudice subi par M. X…, conformément à la demande de celui-ci ».
  • En appel, la société condamnée apporte-t-elle des éléments financiers complémentaires ?

Non, elle se limite à prétendre à « l’absence totale d’exploitation commerciale des produits contrefaisants ». Pour la Cour cette attitude « met au contraire en évidence la réalité d’une telle exploitation et le soin apporté par cette même société a en dissimuler l’étendue » ;

La Cour confirme le jugement et ajoute 5 000 Euros aux montants indemnitaires retenus par le Tribunal.