La tolérance en droit des marques est une notion communautaire

La tolérance nous dit la directive 89/104/CE en son article 9 s’applique à celui qui a toléré « l’usage d’une marque postérieure enregistrée dans cet État membre pendant une période de cinq années consécutives en connaissance de cet usage, ne peut plus demander la nullité ni s’opposer à l’usage de la marque postérieure sur la base de cette marque antérieure ».fraicheur de l'eau alternative à Bud et Budweisser

L’arrêt rendu le 22 septembre, C‑482/09, par la Cour de Justice est intervenu dans un des nombreux conflits relatifs à « Bud » et « Budweiser ».

La situation à l’origine de l’affaire s’est présentée au Royaume Uni :

– Budvar a obtenu deux enregistrements en tant que marque, l’un pour Bud (demande présentée au mois de novembre 1976) et l’autre pour Budweiser (demande effectuée au mois de juin 1989).

– Anheuser-Busch est titulaire d’un enregistrement en tant que marque sur Budweiser (demande introduite au mois de décembre 1979).

Mais ces enregistrements sur Budweiser sont intervenus à la suite d’une décision de la Court of Appeal (England & Wales), par inscription au registre des marques du Royaume-Uni, le 19 mai 2000,

Le 18 mai 2005, soit quatre ans et 364 jours après l’enregistrement de la marque Budweiser au bénéfice de Budvar et d’Anheuser-Busch, cette dernière a introduit auprès de l’Office des marques du Royaume-Uni une demande en nullité à l’encontre de l’enregistrement de cette marque effectué au profit de Budvar.

L’Office des marques du Royaume-Uni annule la marque, le 19 février 2008, la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division, rejette le recours puis la juridiction de renvoi saisit la Cour de Justice quant à l’interprétation de l’article 9 de la directive 89/104, notamment en ce qui concerne les notions de «tolérance» et de «période».

 

1)      La tolérance, au sens de l’article 9, paragraphe 1, de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques, est une notion du droit de l’Union et le titulaire d’une marque antérieure ne peut être réputé avoir toléré l’usage honnête bien établi et de longue durée, dont il a connaissance depuis longtemps, par un tiers d’une marque postérieure identique à celle de ce titulaire si ce dernier était privé de toute possibilité de s’opposer à cet usage.

2)      L’enregistrement de la marque antérieure dans l’État membre concerné ne constitue pas une condition nécessaire pour faire courir le délai de forclusion par tolérance prévu à l’article 9, paragraphe 1, de la directive 89/104. Les conditions nécessaires pour faire courir ce délai de forclusion, qu’il incombe au juge national de vérifier, sont, premièrement, l’enregistrement de la marque postérieure dans l’État membre concerné, deuxièmement, le fait que le dépôt de cette marque a été effectué de bonne foi, troisièmement, l’usage de la marque postérieure par le titulaire de celle-ci dans l’État membre où elle a été enregistrée et, quatrièmement, la connaissance par le titulaire de la marque antérieure de l’enregistrement de la marque postérieure et de l’usage de celle-ci après son enregistrement.

3)      L’article 4, paragraphe 1, sous a), de la directive 89/104 doit être interprété en ce sens que le titulaire d’une marque antérieure ne saurait obtenir l’annulation d’une marque postérieure identique désignant des produits identiques dans le cas d’un usage simultané honnête et de longue durée de ces deux marques lorsque, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, cet usage ne porte pas atteinte ou n’est pas susceptible de porter atteinte à la fonction essentielle de la marque qui est de garantir aux consommateurs la provenance des produits ou des services.

 

Ces dernières lignes devraient elles être comprises comme l’exigence d’un intérêt à agir en nullité d’une marque ?

Mots cléfs, la Cour de Justice permet de sanctionner cette pratique par le droit des marques

Protection de la marque contre les emplois du même signe à titre de mots clefs par un concurrent, le système Adwords, la Cour de Justice rend le 22 septembre 2011, C‑323/09, un arrêt protecteur des intérêts des titulaires de marque

1)      Les articles 5, paragraphe 1, sous a), de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques, et 9, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire, doivent être interprétés en ce sens que le titulaire d’une marque est habilité à interdire à un concurrent de faire, à partir d’un mot clé identique à cette marque que ce concurrent a, sans le consentement dudit titulaire, sélectionné dans le cadre d’un service de référencement sur Internet, de la publicité pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels ladite marque est enregistrée, lorsque cet usage est susceptible de porter atteinte à l’une des fonctions de la marque. Un tel usage:

–      porte atteinte à la fonction d’indication d’origine de la marque lorsque la publicité affichée à partir dudit mot clé ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’internaute normalement informé et raisonnablement attentif de savoir si les produits ou les services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers;

–      ne porte pas atteinte, dans le cadre d’un service de référencement ayant les caractéristiques de celui en cause au principal, à la fonction de publicité de la marque, et

–      porte atteinte à la fonction d’investissement de la marque s’il gêne de manière substantielle l’emploi, par ledit titulaire, de sa marque pour acquérir ou conserver une réputation susceptible d’attirer et de fidéliser des consommateurs.

2)      Les articles 5, paragraphe 2, de la directive 89/104 et 9, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 doivent être interprétés en ce sens que le titulaire d’une marque renommée est habilité à interdire à un concurrent de faire de la publicité à partir d’un mot clé correspondant à cette marque que ce concurrent a, sans le consentement dudit titulaire, sélectionné dans le cadre d’un service de référencement sur Internet, lorsque ledit concurrent tire ainsi un profit indu du caractère distinctif ou de la renommée de la marque (parasitisme) ou lorsque ladite publicité porte préjudice à ce caractère distinctif (dilution) ou à cette renommée (ternissement).

Une publicité à partir d’un tel mot clé porte préjudice au caractère distinctif de la marque renommée (dilution), notamment, si elle contribue à une dénaturation de cette marque en terme générique.

En revanche, le titulaire d’une marque renommée n’est pas habilité à interdire, notamment, des publicités affichées par des concurrents à partir de mots clés correspondant à cette marque et proposant, sans offrir une simple imitation des produits ou des services du titulaire de ladite marque, sans causer une dilution ou un ternissement et sans au demeurant porter atteinte aux fonctions de la marque renommée, une alternative par rapport aux produits ou aux services du titulaire de celle-ci.

 

L’amendement qui vise à limiter la protection des marques qui portent sur la forme et la couleur des médicaments


Le 24 septembre 2011, l’amendement présenté par M Robinet propose d’autoriser les exploitants de médicaments génériques à reproduire les marques utilisées par le médicament quand celles-ci portent sur la forme ou la couleur.Amendement sur les médicaments génériques et les marques sur la forme et la couleur des médicaments

Cet amendement intervient lors des débats sur le renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de la santé

L‘article proposé

APRÈS L’ARTICLE 30, insérer l’article suivant :

Après l’article L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article L. 713-7 ainsi rédigé :

« Art. L. 713-7. – L’enregistrement d’une marque protégeant l’aspect tridimensionnel ou la couleur de la forme pharmaceutique d’une spécialité de référence ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage par un tiers du même signe ou d’un signe similaire pour une spécialité générique au sens du 5° de l’article L. 5121-1 du code de la santé publique, destinée à être substituée à cette spécialité de référence dans les conditions prévues par l’article L. 5125-23 dudit code, pour autant que cet usage ne soit pas tel qu’il donne l’impression qu’il existe un lien commercial entre le tiers et le titulaire de la marque. ».

Est reproduit également l’exposé de cet amendement

Cet article entend faciliter le développement des médicaments génériques et favoriser l’observance des traitements en créant une dérogation à la protection des droits de propriété intellectuelle pour ce qui concerne certains éléments non essentiels du médicament de référence (couleur, forme).

En effet, certaines personnes, notamment les plus âgées, ont parfois des difficultés d’observance de traitements, perturbés par le changement d’apparence du générique par rapport à son princeps. Cet amendement vise donc à autoriser les spécialités génériques à disposer des mêmes caractères d’apparence que les spécialités de référence auxquelles elles se substituent sans pour autant porter atteinte aux règles de protection des marques et dessins.

Sur ce dernier point, le lecteur aura relevé que cet amendement ne vise qu’à modifier les dispositions du droit des marques et non celles applicables aux dessins et modèles

A rappeler également que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 contenait un article 36 :

(CMP) Article 29 bis 36

Après l’article L. 5121-10-2 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 5121-10-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 5121-10-3. – Le titulaire d’un droit de propriété intellectuelle protégeant l’apparence et la texture des formes pharmaceutiques orales d’une spécialité de référence au sens de l’article L. 5121-1 ne peut interdire que les formes pharmaceutiques orales d’une spécialité générique susceptible d’être substituée à cette spécialité en application de l’article L. 5125-23 présentent une apparence et une texture identiques ou similaires. »

 

Article qui a été censuré par le Conseil Constitutionnel dans sa décision n° 2009-596 du 22 décembre 2009 :

Considérant que ces dispositions n’ont pas d’effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement ; que, par suite, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale ;

A rappeler enfin, une tendance des juges français à limiter à la seule commercialisation les mesures d’interdiction en cas de contrefaçon alléguée de brevet et de CCP