Déchéance de marque : l’inaction des revendeurs et la détermination de l’utilisateur final

L’arrêt du 6 mars 2014 de la Cour de justice distingue la connaissance de l’existence de la marque par le revendeur de l’ignorance par le consommateur final de l’origine du produit. L’arrêt est ici.

  • Les faits distinguent ceux qui emploient effectivement le signe comme une maque et la situation de l’utilisateur final

8       Backaldrin a fait enregistrer la marque verbale autrichienne KORNSPITZ pour des produits relevant de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié. Parmi ces produits figurent notamment les suivants:

«farines et préparations faites de céréales; produits de boulangerie; améliorants de panification; pâtisserie, y compris préparations destinées à être cuites; pâtons […] pour la fabrication de pâtisseries».

9        Backaldrin produit, sous cette marque, un mélange prêt à l’emploi qu’elle livre essentiellement aux boulangers. Ceux-ci transforment ce mélange en un petit pain à la forme oblongue se terminant en pointe aux deux extrémités. Backaldrin a consenti à ce que ces boulangers et les distributeurs de produits alimentaires qu’ils livrent, vendent ce petit pain en employant ladite marque.

10      Les concurrents de Backaldrin, dont Pfahnl, comme la majorité des boulangers, savent que le signe verbal «KORNSPITZ» a été enregistré en tant que marque. En revanche, selon les affirmations de Pfahnl contestées par Backaldrin, ce signe verbal est perçu par les utilisateurs finals comme la désignation usuelle d’un produit de boulangerie, à savoir des petits pains à la forme oblongue se terminant en pointe aux deux extrémités. Cette perception s’expliquerait notamment par la circonstance que les boulangers utilisant le mélange prêt à l’emploi fourni par Backaldrin n’informent généralement leurs clients ni de ce que le signe «KORNSPITZ» a été enregistré en tant que marque ni de ce que les petits pains sont fabriqués à partir de ce mélange.

  • Les questions préjudicielles

Une action en déchéance est engagée en Autriche, l’Oberster Patent- und Markensenat (Chambre supérieure des brevets et des marques) interroge la Cour de Justice sur la notion d’utilisateur final pour apprécier les circonstances de la déchéance de la marque

  • L’absence d’indication de la provenance des produits aux consommateurs finaux

25      L’hypothèse présentée dans la décision de renvoi est, au surplus, caractérisée par la circonstance que les vendeurs dudit produit fini n’offrent généralement pas à leurs clients, au moment de la vente, une assistance comprenant l’indication de la provenance des différents produits qui sont en vente.

26      Force est de constater que, dans une telle hypothèse, la marque KORNSPITZ ne remplit pas, dans le commerce des petits pains dits «KORNSPITZ», sa fonction essentielle d’indication d’origine et que, par conséquent, son titulaire s’expose à la déchéance des droits conférés par cette marque en ce qu’elle est enregistrée pour ce produit fini si la perte du caractère distinctif de ladite marque pour ledit produit est imputable à l’activité ou à l’inactivité de ce titulaire.

La Cour a déjà jugé que peut relever de la notion d’«inactivité» l’omission du titulaire d’une marque de recourir en temps utile à son droit exclusif visé à l’article 5 de la même directive, afin de demander à l’autorité compétente d’interdire aux tiers concernés de faire usage du signe pour lequel il existe un risque de confusion avec cette marque, de telles demandes ayant pour objet de préserver le caractère distinctif de ladite marque.

34      Toutefois, sauf à renoncer à la recherche de l’équilibre décrit au point 32 du présent arrêt, ladite notion n’est aucunement limitée à ce type d’omission, mais comprend toutes celles par lesquelles le titulaire d’une marque se montre insuffisamment vigilant quant à la préservation du caractère distinctif de sa marque. Dès lors, dans une situation telle que celle décrite par la juridiction de renvoi, dans laquelle les vendeurs du produit obtenu à partir de la matière livrée par le titulaire de la marque n’informent généralement pas leurs clients de ce que le signe utilisé pour désigner le produit en cause a été enregistré en tant que marque et contribuent ainsi à la mutation de cette marque en désignation usuelle, la carence dudit titulaire qui ne prend aucune initiative susceptible d’inciter ces vendeurs à utiliser davantage ladite marque peut être qualifiée d’inactivité au sens de l’article 12, paragraphe 2, sous a), de la directive 2008/95.

35      Il appartiendra à la juridiction de renvoi d’examiner si, en l’occurrence, Backaldrin a ou non pris des initiatives visant à inciter les boulangers et distributeurs de produits alimentaires vendant les petits pains obtenus à partir du mélange prêt à l’emploi livré par elle à utiliser davantage la marque KORNSPITZ dans leurs contacts commerciaux avec les clients.

36      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de répondre à la deuxième question posée que l’article 12, paragraphe 2, sous a), de la directive 2008/95 doit être interprété en ce sens que peut être qualifié d’«inactivité», au sens de cette disposition, le fait pour le titulaire d’une marque de s’abstenir d’inciter les vendeurs à utiliser davantage cette marque pour la commercialisation d’un produit pour lequel ladite marque est enregistrée.

 

 

Alicante et Luxembourg, deux villes, l’une connaît les parapluies et les parasols, l’autre que les parapluies

– l’OHMI est à Alicante,  le site de l’office du tourisme.

– Le Tribunal siège à Luxembourg, la ville de Luxembourg .

L’arrêt du 27 février 2014 du Tribunal annule partiellement une décision de la Chambre de recours qui avait  retenu une similarité entre les parapluies et les parasols. L’arrêt du 27 février 2014 est ici,

La motivation de l’arrêt du 27 février 2014 mérite d’être citée.

2      Concernant la comparaison des parasols et des parapluies, force est de juger que l’analyse de la chambre de recours n’est que partiellement exacte. En effet, si les parapluies et les parasols fonctionnent selon un même type de mécanisme, à savoir un mât soutenant un morceau de toile circulaire tendue au moyen de baleines et d’un dispositif coulissant, s’ils visent tous deux à protéger les êtres humains de certains désagréments causés par les conditions météorologiques et s’ils sont complémentaires, il convient de souligner que leurs utilisateurs finaux ne sont pas les mêmes et que les canaux de distribution de ces produits diffèrent fréquemment. Ainsi, alors que le parasol répond surtout à une finalité de loisir, qui s’exprime le plus souvent durant la période printanière ou estivale, en particulier sur les lieux de vacances, le parapluie correspond à une nécessité plus quotidienne, qui est majoritairement le fait d’un public citadin. Certes, ces produits s’adressant au consommateur moyen de l’Union, les spécificités climatiques de l’un ou l’autre État membre pourront parfois conduire à nuancer cette distinction, sans toutefois la remettre en cause. La chambre de recours pouvait donc, à bon droit, conclure à la similitude des parapluies et des parasols, mais se devait, en revanche, d’insister sur le faible degré de cette similitude, ce qu’elle n’a pas fait.

Marque communautaire, un rebondissement à propos d’une erreur de droit qui va au-delà des marques tridimensionnelles

L’arrêt du Tribunal en date du 12 mai 2012 avait relancé le débat sur les marques bidimensionnelle ( des marques  tridimensionnelles le plus souvent) en annulant la décision de la Chambre de recours qui était intervenue contre une décision de la division d’annulation consécutivement à une demande de nullité de la marque communautaire après son enregistrement.

Trois griefs avaient été dirigés contre la chambre de recours, le Tribunal n’en avait réellement examiné qu’un pour annuler la décision de la Chambre de recours.

L’arrêt du 12 mai 2012 est ici

Les marques dont l’enregistrement avait été demandé :

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour mémoire, le Tribunal avait retenu :

35      Partant, c’est à tort que la chambre de recours s’est écartée de la représentation graphique de la marque contestée lorsqu’elle s’est référée aux représentations des produits effectivement commercialisés par la requérante pour conclure au caractère concave des pois noirs figurant dans cette dernière marque.

Le 6 mars 2014, la Cour examine un recours contre cet arrêt du 12 mai 2012. l’arrêt du 6 mars est ici

Le point 18 nous rappelle la problématique de ces points (pois):

Enfin, la première chambre de recours a examiné, aux points 33 à 41 des décisions litigieuses, si les pois noirs représentant des creux répondaient à une fonction technique. En s’appuyant sur les données relatives aux brevets existants, elle a conclu que les creux étaient nécessaires à l’obtention d’un effet antidérapant et que le fait qu’il était possible d’obtenir le même résultat avec d’autres formes n’excluait pas l’application du motif de refus en cause.

Mais ce que dit la Cour pour infirmer cet arrêt du 12 mai 2012, va bien au-delà des marques tridimensionnelles.

Enfin, le Tribunal a résumé, au point 31 des arrêts attaqués, le critère retenu à l’égard de l’étendue de l’examen à effectuer par l’autorité compétente lors de l’appréciation des caractéristiques des signes litigieux, en jugeant que «seule la forme telle que reproduite dans la demande d’enregistrement doit faire l’objet de l’examen de la marque».

54      Cependant, il ressort de l’arrêt Lego Juris/OHMI, précité, que l’autorité compétente peut effectuer un examen approfondi dans le cadre duquel sont pris en compte, outre la représentation graphique et les éventuelles descriptions déposées lors du dépôt de la demande d’enregistrement, des éléments utiles à l’identification convenable des caractéristiques essentielles d’un signe.

55      Cette possibilité offerte, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt Lego Juris/OHMI, à l’autorité compétente lors de l’examen d’un signe tridimensionnel peut été étendue à l’examen de tout signe constitué par la forme d’un produit au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 40/94 (voir par analogie, s’agissant de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement, notamment, arrêts Henkel/OHMI, précité, point 38, et du 6 septembre 2012, Storck/OHMI, C-96/11 P, point 33).

57      Certes, il ressort de la jurisprudence de la Cour, rappelée aux points 31 et 32 des arrêts attaqués, d’une part, que la représentation graphique d’une marque doit être complète par elle-même, facilement accessible et intelligible afin qu’un signe puisse faire l’objet d’une perception constante et sûre qui garantisse la fonction d’origine de ladite marque. Il découle, d’autre part, de la jurisprudence de la Cour que l’exigence de la représentation graphique a pour fonction notamment de définir la marque elle-même afin de déterminer l’objet exact de la protection conférée par la marque enregistrée à son titulaire …..

58      Toutefois, les conditions que la représentation graphique doit remplir pour assurer sa fonction, lesquelles concernent l’aptitude générale d’un signe à constituer une marque au sens de l’article 4 du règlement n° 40/94, ne sauraient restreindre l’examen de l’autorité compétente dans le cadre de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du même règlement, d’une façon qui serait susceptible de porter atteinte à l’intérêt général qui sous-tend cette dernière disposition.

59      En second lieu, ainsi que l’a rappelé le Tribunal au point 33 des arrêts attaqués, la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque communautaire est la date pertinente pour l’examen du motif de nullité allégué (voir ordonnances du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, Rec. p. I‑8993, point 40, et du 16 mai 2011 Torresan/OHMI, C-5/10 P, point 84).

60      Cependant, tel que le souligne l’OHMI dans le cadre de la deuxième branche de son second moyen, la Cour a jugé à maintes reprises que des éléments qui, bien que postérieurs à la date du dépôt de la demande d’enregistrement, permettent de tirer des conclusions sur la situation telle qu’elle se présentait à cette même date peuvent, sans erreur de droit, être pris en considération (voir ordonnances précitées Alcon/OHMI, point 41, et Torresan/OHMI, point 84).

61      Il en résulte que, en concluant que les dispositions en cause excluent la prise en compte de l’utilisation effective de la marque après son enregistrement, le Tribunal a commis une erreur de droit.

Presse papier et presse en ligne, l’harmonisation des taux de TVA

La presse en ligne ne bénéficiait pas du taux super-réduit de 2,1 % de la TVA existant en faveur de la presse papier.  Le taux de TVA applicable à la presse en ligne était de 20 %.  Une proposition de loi a été déposée le 24 janvier 2014. Ici.  Elle a été votée le 27 février .

La loi n° 2014-237 du 27 février 2014 harmonisant les taux de la taxe sur la valeur ajoutée applicables à la presse imprimée et à la presse en ligne vient d’être publiée au JO.

Article 298 septies

A compter du 1er janvier 1989, les ventes, commissions et courtages portant sur les publications qui remplissent les conditions prévues par les articles 72 et 73 de l’annexe III au présent code pris en application de l’article 52 de la loi du 28 février 1934, sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée au taux de 2,1 % dans les départements de la France métropolitaine et de 1,05 % dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion.

Sont également soumis aux mêmes taux de la taxe sur la valeur ajoutée les ventes, commissions et courtages portant sur les services de presse en ligne reconnus comme tels en application de l’article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse.