Contentieux de la décision de l’OHMI, uniquement sur un vice de procédure

Arrêt du Tribunal du 24 novembre 2010, dans l’affaire T 137/09,

Opposition est faite contre un dépôt de marque portant sur le signe R10, en invoquant un droit non enregistré.

Ultérieurement, le cessionnaire de ce droit non enregistré entend intervenir à la suite de son cédant à la procédure.

L’OHMI rejette l’opposition au motif que les preuves de l’existence de ce droit antérieur ne sont pas apportées.

Le cessionnaire conteste cette décision mais la Chambre de recours de l’office le rejette au motif que sa qualité n’est pas établie.

Le cessionnaire saisi le Tribunal, mais sur quoi sa décision peut-elle porter ?

  • La possibilité donnée au cessionnaire de faire état de sa qualité ?
  • La possibilité pour le cessionnaire de justifier de sa qualité ?
  • L’existence du droit antérieur ?
  • Le caractère suffisant des preuves apportées ?
  • ou le bien fondé de son opposition, c’est à dire l’examen au fond de l’opposition ?

Pour le Tribunal :

  • devant la division d’opposition, le cessionnaire n’avait pas eu la possibilité de faire état de sa qualité,
  • la Chambre de recours ne pouvait pas invoquer cette absence pour lui refuser l’examen de son recours,

Mais au delà de ces aspects formels, aucune preuve de l’existence de ce droit antérieur n’avait été produite devant la division d’opposition. Comment le Tribunal aurait-il pu examiner la légalité de la décision de la Chambre de recours sur des preuves qui ne lui avaient pas été soumises.

Résultat, si la décision de la Chambre de recours est effectivement infirmée, le Tribunal refuse de modifier cette décision dans le sens demandé par le cessionnaire.

Accord entre 3 sociétés de gestion collectives et YouTube

Le 25 novembre, un accord pour la rémunération en cas d’exploitation des œuvres a été signé avec You Tube et trois sociétés de gestion collectives de droits des auteurs :

  • la SACD (Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques),
  • la SCAM (Société Civile des Auteurs Multimedia)
  • et  l’ADAGP (Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques)

Marque communautaire, comment apprécier sa protection ? La question préjudicielle posée par la Cour de Cassation à la CJCE

L’arrêt de la Cour de Paris du 9 novembre 2007 a été cité ci-dessous, venons-en à l’arrêt de la Cour de Cassation du 23 juin 2009 qui renvoie à la Cour de justice des communautés européennes aux fins de répondre aux questions suivantes :

1°/ L’article 98 du règlement CE 40/94 du 20 décembre 1993 doit-il s’interpréter en ce sens que l’interdiction prononcée par un tribunal des marques communautaires a effet de plein droit sur l’ensemble du territoire de la Communauté ?

2°/ Dans la négative, le tribunal est-il en droit d’étendre spécifiquement cette interdiction sur le territoire d’autres Etats dans lesquels les faits de contrefaçon sont commis, ou menacent d’être commis ?

3°/ Dans l’un ou l’autre cas, les mesures coercitives dont le tribunal, par application de son droit national, a assorti l’interdiction qu’il prononce sont-elles applicables sur le territoire des Etats membres dans lesquels cette interdiction produirait effet ?

4°/ Dans le cas contraire, le tribunal peut-il prononcer une telle mesure coercitive, semblable ou différente de celle qu’il adopte en vertu de son droit national, par application du droit national des Etats dans lequel cette interdiction aurait effet ?

Marque communautaire : comment apprécier sa protection ?

Si la marque communautaire constitue un seul titre pour l’ensemble des États de l’Union Européenne, sa protection doit-elle être appréciée uniformément sur l’ensemble de ces États bien que ceux-ci connaissent des régimes linguistiques différents et des cultures qui leur sont propres ?

La Cour de Paris par un arrêt du 9 novembre 2007 dans une affaire où la contrefaçon par imitation d’une marque communautaire verbale avait été établie : « qu’au regard de la perception que peuvent en avoir les consommateurs français ou parlant français ».


A propos de la mesure d’interdiction qui avait été demandée pour l’ensemble de l’espace communautaire,  la Cour a souhaité la soumettre à conditions qui portent à la fois sur le contenu des lois nationales et de la compréhension par  les publics concernés  :

Considérant à cet égard, que l’article 98 du Règlement CE du 12 décembre 1993 énonce que lorsqu’un tribunal des marques communautaires constate que le défendeur a contrefait une marque communautaire, il rend, sauf “s’il y a des raisons particulières de ne pas le faire, une ordonnance lui interdisant de poursuivre les actes de contrefaçon” ; que ce même article ajoute “il prend également conformément à la loi nationale, les mesures propres à garantir le respect de cette interdiction”;
Qu’il suit dès lors que le prononcé d’une mesure d’interdiction sous astreinte à l’échelle communautaire suppose que le tribunal des marques communautaire ait communication des lois nationales prévoyant une mesure comparable;
Qu’en outre, s’agissant en l’espèce de la contrefaçon par imitation, d’une marque verbale, l’existence d’un risque de confusion entre les signes en présence n’a été appréciée qu’au regard de la perception que peuvent en avoir les consommateurs français ou parlant français
Que, dès lors, l’interdiction prononcée ne saurait s’étendre à l’ensemble de l’espace communautaire•

En se reportant à l’arrêt, le lecteur notera que cette problématique ne se retrouve pas dans son dispositif mais la Cour de Cassation dans son arrêt cité ci-dessus  considère :

il « interdit la poursuite des actes précités sous astreinte », et il résulte expressément de ses motifs que cette interdiction sous astreinte doit s’entendre comme concernant le seul territoire français;

Appréciation du risque de confusion : comment le consommateur commande-t-il des vins dans des bars et des restaurants ?

L’arrêt rendu par le TPICE le 23 novembre 2010 souligne, une fois encore, la complexité de l’appréciation du risque pour le nouveau déposant au regard d’une marque antérieure.

Le dépôt contesté

Sur la similitude visuelle :

La comparaison visuelle entre les signes en conflit doit être effectuée sur la base de l’ensemble de leurs différents éléments constitutifs, figuratifs et verbaux. ….Les signes en conflit présentent d’importantes différences concernant la forme, la taille et la couleur de leurs éléments

Sur la similitude phonétique :

L’expression « artesa napa valley » de la marque demandée produit une impression phonétique différente de celle produite par le mot « arteso ».

Mais le Tribunal va disqualifier cette expression pour l’appréciation de ce risque :

Le public pertinent anglophone percevra plutôt cet élément comme une indication de l’origine géographique des produits en question, et non comme un élément distinctif de la marque demandée. »

C’est sur ce motif que le Tribunal rejettera le recours contre la décision de l’OHMI qui avait refusé l’enregistrement du dépôt.

La marque antérieure

Toutefois, pour refuser de donner une signification particulière au dépôt, le Tribunal s’en explique plus particulièrement à propos de l’expression  « napa valley » :

il y a lieu de considérer que l’expression « napa valley » n’est pas suffisante afin d’éviter que le public puisse croire que les produits en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Certes, ainsi qu’il a été relevé au point 49 ci-dessus, l’expression en cause sera perçue comme une indication de l’origine géographique des produits en cause par une partie significative du public pertinent, mais sans que ce dernier attribue au signe un contenu conceptuel particulier.

Mais finalement ces distinctions sont-elles bien nécessaires au regard des pratiques des consommateurs ?

Oui, puisqu’après avoir décomposé les différents risques de similitudes,  la démarche méthodologique, le Tribunal apprécie globalement les signes en cause en les pondérant par un élément factuel : le comportement particulier du consommateur pour commander des vins :

« Dans le secteur des vins, ……….les consommateurs de ces produits sont habitués à les désigner et à les reconnaître en fonction de l’élément verbal qui sert à les identifier, en particulier dans les bars ou les restaurants, dans lesquels les vins sont commandés oralement après avoir vu leur nom sur la carte. Dès lors, en l’espèce, il convient d’attacher une importance particulière à la similitude phonétique entre les signes en cause.